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Mon chien a peur
Mon chien a peur
Edith Beaumont-Graff
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Votre toutou se cache sous le lit à chaque coup de tonnerre ? Tremble à
la rencontre d'un autre chien ? Ne supporte pas de rester seul ? Il
craint les inconnus et gronde en présence d'enfants ? Edith
Beaumont-Graff et Nicolas Massai, vétérinaires comportementalistes,
décryptent les peurs de votre chien et vous livrent les outils pour
l'apaiser dans toutes les situations. Quelle que soit l'origine de son
Rok:
2014
Język:
french
ISBN 10:
2212558945
ISBN 13:
9782212558944
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Votre toutou se cache sous le lit à chaque coup de tonnerre ? Tremble à la rencontre d’un autre chien ? Ne supporte pas de rester seul ? Il craint les inconnus et gronde en présence d’enfants ? Édith Beaumont-Graff et Nicolas Massal, vétérinaires comportementalistes, décryptent les peurs de votre chien et vous livrent les outils pour l’apaiser dans toutes les situations. Quelle que soit l’origine de son anxiété, vous saurez comment : Apprendre la confiance à votre chiot Habituer votre chien au bruit Prévenir les tensions avec les autres chiens Désamorcer sa peur lorsque vous vous absentez Gérer la relation avec les enfants Faire de la promenade un moment de plaisir partagé Édith Beaumont-Graff Nicolas Massal Mon chien a peur Mieux le comprendre et l’apaiser au quotidien Groupe Eyrolles 61, bd Saint-Germain 75240 Paris Cedex 05 www.editions-eyrolles.com Avec la collaboration de Charline Malaval Mise en pages : Florian Hue En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. © Groupe Eyrolles, 2014 ISBN : 978-2-212-55894-4 Table des matières Introduction Pourquoi mon chien a-t-il peur ? Chapitre 1 Mon chiot a peur de tout Le syndrome de privation Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Anticiper les difficultés Comment empêcher que cela se reproduise ? Quand consulter ? Chapitre 2 Mon chien a peur de l’orage L’enchaînement des mécanismes de la peur Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Comment empêcher que cela se reproduise ? Quand consulter ? Chapitre 3 Mon chien a peur des autres chiens Le mécanisme de cette rencontre Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Comment redonner confiance ? Quand consulter ? Chapitre 4 Mon chien a peur de rester seul Comment en sont-ils arrivés là; ? Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Comment empêcher que cela se reproduise ? Quand consulter ? Chapitre 5 Mon chien a peur des enfants Comment en sont-ils arrivés là ? Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Comment empêcher que cela se reproduise ? Quand consulter ? Chapitre 6 Mon chien refuse de sortir dans la rue Comment en sont-ils arrivés là ? Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Comment empêcher que cela se reproduise ? Quand consulter ? Chapitre 7 Mon chien a peur qu’on le touche Comment en sont-ils arrivés là ? Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Comment empêcher que cela se reproduise ? Quand consulter ? Chapitre 8 Mon vieux chien devient inquiet de tout Comment en sont-ils arrivés là ? Comment réagir ? La prévention est-elle possible ? Empêcher les peurs du vieux chien ? Quand consulter ? Conclusion Introduction Peur du monde, des éléments naturels, des autres êtres vivants, inquiétude permanente ou incapacité à sortir du cadre connu, les tableaux de la peur sont multiples et variés. Dans tous les cas, la vie du chien peureux est rendue difficile et celle de son maître peut virer à l’épreuve permanente. La relation en pâtit bien souvent. La vie de votre chien est peut-être fortement perturbée par ses réactions de peur. Vous voyez qu’il en souffre mais vous ne parvenez pas à l’aider efficacement. Une approche globale est nécessaire pour apporter un soutien actif. Percevoir la situation à sa manière et comprendre comment il interprète vos messages vous aidera à réagir au mieux et assurera la réussite de votre intervention. Des actions synchronisées, se renforçant les unes les autres, sont nécessaires pour stabiliser les émotions de votre chien, lui redonner le goût de la découverte, permettre des apprentissages. Vous découvrirez au fil de ce livre que les réponses spontanées ne sont pas toujours les meilleures. Vous comprendrez pourquoi certains messages, pourtant destinés à l’apaiser, contribuent au contraire à aggraver la peur. Ces pages qui sont autant de rencontres avec des chiens peureux et des propriétaires voulant bien faire, sont l’occasion de déchiffrer le langage canin et de choisir des attitudes intelligibles par nos compagnons à quatre pattes. Ces nouvelles connaissances créeront une relation harmonieuse basée sur l’efficacité de la communication entre le maître et son chien. Pourquoi mon chien a-t-il peur ? Avant d’analyser les situations qui déclenchent la peur, détaillons les éléments qui nous aident à comprendre. Ceux-ci nous serviront à contrôler la peur de nos chiens puis à élaborer des stratégies visant à augmenter leurs compétences et à réguler leurs émotions. Certaines peurs sont primitives et universelles Alors qu’Ignis se promène dans le bois, flairant les traces laissées par différents animaux, son maître la voit soudain lever la tête, tous les sens en alerte. Que se passe-t-il ? Un chevreuil passe à quelques mètres, bondissant grâcieusement mais la chienne n’y prête pas attention! Elle reste tendue vers l’avant et ne se retourne même pas sur son passage. La chienne court ensuite vers son maître. Il sent des odeurs de brûlé, puis distingue une épaisse fumée : il y a le feu ! Se joignant à tous les animaux, le maître fuit lui aussi ce feu qui a toujours effrayé les êtres vivants. La peur fait partie de l’instinct de survie. Elle génère des comportements qui assurent la sauvegarde physique de l’individu. Elle permet de s’éloigner du danger ou de ne pas s’en approcher. Cette émotion est partagée et facilement contagieuse : son expression est universelle. Les signaux de la peur sont communs et compris de tous. Certains motifs de peur sont très répandus : la peur des moteurs, des détonations, des orages, des serpents...Ces peurs sont dites « ataviques ». Leurs bases sont primitives, transmises de génération en génération. Spontanées, elles n’ont pas besoin d’apprentissage ou d’exposition préalable. Ces peurs ont sans doute joué un rôle dans la préservation de l’espèce. Chez le chien, la peur de l’inconnu ou des objets susceptibles de frapper, comme un bâton dans une main, appartiennent à la même catégorie. La peur intervient dans la sélection naturelle : les sujets timorés n’explorent pas assez, les intrépides ne survivent pas longtemps. Il est indispensable d’avoir peur ! La peur est souvent bonne conseillère Méca part tous les jours se promener avec sa maîtresse. Leur parcours croise une route fréquentée, la chienne est alors mise en laisse. Cette routine s’est mise en place d’elle-même car, depuis toujours, la chienne change de comportement à l’approche des autos. Alors qu’elle court habituellement au-devant de sa maîtresse, de droite à gauche au gré des odeurs ou des objets en mouvements, elle n’est plus la même lorsqu’elle les entend. Son corps se raidit, ses oreilles se dressent, ses narines se dilatent et frémissent. Elle lève la tête, tout son corps est tendu. C’est pourtant toujours le même bruit mais il lui fait chaque fois le même effet. La chienne fofolle devient docile et obéissante, elle attend sa maîtresse et se met à ses ordres, sous sa protection... La peur met le corps en alerte, optimise les sens, augmente la perception de tous les éléments de l’environnement avant même la survenue du danger réel... Le passage à l’action est ainsi facilité : la respiration s’améliore, les narines se dilatent et le rythme s’accélère, le cœur bat plus vite et les muscles sont tendus, prêts à exécuter des mouvements immédiats. La peur est donc une émotion utile, qu’il faut ménager et non combattre à tout prix. Les choix d’intervention et de correction doivent tenir compte de cette fonction. La disparition de la peur conduirait à des prises de risque excessives ou à une mise en danger inconsidérée. La peur peut être un obstacle Fidji est timide, elle se promène en observant tout autour d’elle avant de s’avancer. Son maître le sait et ne la brusque pas. Il va à son rythme et de temps en temps s’arrête et attend qu’elle le rejoigne. Cette nuit le vent a soufflé fort et la chienne a tremblé une partie de la nuit. Au matin, la promenade devient une véritable aventure : le vent a déplacé des objets, soulevé la poussière, abattu des branches. Au détour d’un chemin, c’est un arbre entier qui s’est mis en travers. C’en est trop : Fidji se fige totalement, les yeux exorbités, son regard balaie de droite à gauche comme pour évaluer d’où va jaillir le danger. Il lui est devenu impossible d’avancer et son maître doit se résoudre à rebrousser chemin. Quand la prudence devient excessive ou quand la peur empêche d’avancer, la découverte devient impossible. Le monde extérieur paraît hostile, l’existence s’organise autour des évitements et des renoncements. C’est un cercle vicieux : il est impossible de découvrir des choses nouvelles car l’inconnu terrifie ! Cet excès est nuisible. Quand la peur est trop forte, permanente, elle déclenche un envahissement émotionnel qui s’oppose à l’analyse et à l’apprentissage. Un comportement adaptatif est réversible, proportionnel, fonctionnel. Lorsque ces caractéristiques disparaissent, la peur doit être combattue. Si le retour à l’équilibre ne peut se faire et si les réponses du corps sont systématiquement trop intenses, la tension et les mécanismes neuro-hormonaux induits deviennent toxiques et rendent le chien malade en perturbant le fonctionnement de tous les organes. La réponse précède la conscience du danger Tout est calme dans le jardin, pas de bruit, pas d’agitation. Flash se déplace avec lenteur, nez au sol, flairant consciencieusement toutes les plantes, jetant des regards circulaires comme pour localiser les oiseaux qui chantent dans les arbres. Tout à coup, une branche craque. Flash sursaute et court ventre à terre vers la porte d’entrée. Une fois à l’abri, il cherche l’origine de ce bruit. Tout est redevenu calme. Après un long moment d’attente, Flash reprend ses activités mais il reste vigilant. Cette scène banale montre plusieurs fonctionnements successifs du cerveau. Les structures anciennes du cerveau, présentes chez tous les animaux, provoquent des réponses motrices lors de la perception de signaux. Ce sont des réponses réflexes qui interviennent inconsciemment, sans aucune analyse. Elles ne sont pas raisonnées, ni « raisonnables », c’est-à-dire qu’elles ne sont pas influençables par la raison. Elles sont d’autant plus spontanées que l’individu est déjà en alerte, sa vigilance pouvant être due à une expérience précédente ou à un état d’anxiété. Le cerveau entier se met ensuite en action pour analyser la situation. Le chien tire différentes leçons de cette expérience. Le motif de sa réaction peut ne plus être considéré comme un danger, le chien s’y habitue. Il peut observer et finalement interpréter les signaux reçus différemment, de sorte qu’ils ne constituent plus une menace. Il peut aussi considérer que sa méthode de mise à l’abri est efficace et mérite d’être maintenue. Il peut enfin refuser de retourner dans cette partie du jardin si inconfortable. La stabilité émotionnelle et les expériences précédentes conditionnent la voie choisie. La réponse du chien dépend aussi de celle du maître et des éléments d’apaisement ou de tension que ce dernier apporte. Mémoire et peur, des relations étroites Mémo se promène souvent dans ce bois avec sa maîtresse. Il adore renifler partout pour savoir qui est passé et pour laisser ses propres marques. Il est à l’aise partout, sauf près du ruisseau. Sa maîtresse le sait : à proximité des berges, les poils du dos de Mémo se hérissent, sa tête se redresse et il scrute le chemin avec attention. Il y a deux sentiers possibles à cet endroit, mais il n’emprunte jamais celui de gauche. Même si sa maîtresse y passe, il fonce à droite et la retrouve plus loin. À la réflexion, sa maîtresse réalise qu’il est tendu chaque fois qu’ils approchent d’un cours d’eau. « Il n’aime pas le bruit de l’eau », pense-t-elle. Elle n’était pas présente le jour où un ragondin s’est mis en travers de son chemin, lui causant la peur de sa vie ! Chaque événement entraînant une émotion forte est mémorisé, que l’émotion soit négative comme la peur, ou positive comme le plaisir d’une caresse. La mémoire joue un rôle essentiel, après les réflexes. Le souvenir de l’émotion permet la mise en alerte chaque fois que le chien reconnait une situation. La mémorisation de l’émotion et des circonstances associées (le lieu, le moment, les personnes présentes) permet l’anticipation et la préparation du corps à une réaction appropriée. Les mises en danger sont mémorisées en priorité : c’est un gage de sauvegarde, mais cela rend aussi plus difficile et laborieux l’effacement des souvenirs de peur. C’est pourquoi nous serons amenés à proposer des stratégies complexes, capables de diminuer les réactions de peur. Capter l’attention du chien est essentiel Timi se promène avec son maître. C’est une chienne de la campagne et ses premières sorties en ville ne sont pas de tout repos. Tout est nouveau et provoque des émotions intenses chez elle. Quand au détour d’un chemin elle se trouve face à un autre chien, elle s’arrête, se tend, se met aussitôt à trembler et son arrière-train descend comme si elle allait s’asseoir, la queue entre les jambes, les yeux écarquillés. Son maître voit l’émotion l’envahir. Il l’appelle mais elle ne l’entend pas. II tire sur la laisse mais elle ne le sent pas. Finalement, il donne un coup sec en répétant très fort le nom de la chienne. Elle se retourne vers lui et immédiatement ses yeux se plissent : elle semble sortir d’un étourdissement. Elle se tourne à nouveau vers le chien, sa queue remonte et balaie l’air près du sol. Ça y est, le contact est établi, l’interaction peut commencer. La chienne est surprise, la peur la submerge, son corps produit des réponses automatiques, conditionnées par l’adrénaline, et involontaires : les yeux écarquillés, la respiration accélérée, des tremblements généralisés. C’est l’intervention du maître qui la ramène à la conscience et la sort de cette transe. Il doit insister et produire un signal capable de passer au-dessus des autres. Aussitôt, les interactions peuvent reprendre, la chienne se sent protégée par son maître, elle produit à son intention un signal d’apaisement, celui-ci étant une action volontaire. Elle émet vers le chien un message clair de position basse, dont elle sait qu’il désamorcera une éventuelle hostilité. Sans ce retour à la conscience, l’expérience serait restée traumatisante, l’intervention du maître la transforme en simple rencontre. « La trilogie de la peur ? On appelle « trilogie de la peur » les modalités de réponse d’un être placé en situation de peur : se figer, fuir ou combattre (en anglais, « freeze, fly or fight »). Les modalités de réponse dépendent du contexte, de l’individu, de son expérience, de ses modalités habituelles de réponse à une menace et de sa perception des choix qui s’offrent à lui (inhibition ou action, chance de victoire en cas d’affrontement, possibilité de fuite, enjeu réel de la situation). Comment se montrer rassurant Ella se promène avec sa maîtresse. Très attachée, la chienne reste constamment près d’elle. À chaque situation nouvelle, elle calque ses réactions sur sa propriétaire, se tournant vers elle l’air de dire : « Et là, qu’est-ce qu’on fait ? » À l’approche des grands chiens, elle sent sa laisse se tendre. Elle remarque que sa maîtresse se raidit puis change de direction pour éviter une confrontation directe. En revanche, elle est à l’aise avec les petits chiens et avec ceux dont elle connaît les maîtres. Petit à petit, Ella établit sa liste des chiens fréquentables et de ceux qu’il faut éviter. Ce classement échappe à sa maîtresse car elle n’a pas l’impression de lui montrer ni de lui transmettre ses appréhensions ! Le maître a un rôle majeur L’attitude du maître n’est jamais neutre. Tout ce qu’il fait, ou ne fait pas, donne un sens à la situation vécue par le chien. De plus, l’essentiel des informations transmises est involontaire, souvent même inconscient. Le chien accorde une importance majeure à la communication non verbale, les mots n’ont pas d’importance. Quand vous dites : « N’aie pas peur », en tendant la laisse et en reculant, vous ne le trompez pas beaucoup sur votre propre analyse de la situation ! Tout ce qui ne fonctionne pas pour rassurer votre chien aggrave bien souvent sa peur. Les renforcements involontaires sont nombreux et viennent du fait que chiens et êtres humains ne communiquent pas de la même façon : nous privilégions les mots aux attitudes. Nous décrirons tout au long du livre les attitudes (parfois difficiles à mettre en œuvre) qui rassurent : ne pas montrer sa peur, ne pas créer de tension, ne pas demander de protection, se montrer protecteur. L’autorité bienveillante, vos postures, sont l’attitude rassurante de base qui remplit tous ces critères. Votre chien vous regarde Gori est un grand chien très sûr de lui. Lorsqu’il est en promenade avec sa maîtresse, il marche fièrement devant elle, tête haute, montrant à tous qu’il faut compter avec lui. À chaque rencontre, il se place à ses côtés, attentif aux échanges, visiblement sur le qui-vive. Cela rend sa maîtresse un peu nerveuse car il lui est arrivé de grogner sur des personnes à qui elle parlait. Pourtant, lorsque la discussion se prolonge et que les personnes font quelques pas avec elle, il s’en désintéresse totalement ! Ces changements d’attitudes restent inexplicables pour elle. « Proxémie » : Bases et principes La proxémie est l’étude des postures et de l’occupation de l’espace lors des interactions. Les chiens accordent beaucoup d’importance à ces signaux, ils leur permettent de donner un sens aux interactions. Dans le récit précédent, le chien voit sa maîtresse faire face à des personnes, dans une position d’affrontement. Il se place à ses côtés pour montrer qu’il est son allié et instaurer un rapport de force. Si la propriétaire devient inquiète, le chien attribue cette émotion à la personne qui est en face, il se montre alors menaçant pour le faire fuir ; cela rend sa maîtresse encore plus inquiète et la situation peut dégénérer. En revanche, si les personnes se tiennent côte à côte, c’est qu’elles sont en confiance, tout danger est écarté et le chien peut vaquer à ses occupations. Attention, sa vision périphérique est très efficace et même s’il ne semble pas regarder directement, aucun des mouvements des protagonistes ne lui échappe. La direction indiquée par le corps permet de lire ces messages posturaux : pour le chien il s’agit de l’axe de son corps, facile à déterminer car il est à quatre pattes ; pour les humains, il s’agit de l’axe perpendiculaire à la ligne des épaules, face à la poitrine, quelle que soit la position de la tête. C’est en tournant les épaules que les humains modifient cette direction. Ici, en faisant face à une personne, elle est « désignée » comme responsable des émotions exprimées. Inversement, si le maître se tourne vers le chien pour lui donner un ordre, son attention est concentrée sur lui et la personne n’est plus pointée, le chien ne se trompe plus sur les intentions de son maître. Notez que si l’interlocuteur inquiète vraiment le maître, il devra rester face à lui, dans une attitude de méfiance conforme à la lecture du chien. Au fil du livre, nous proposerons des utilisations pratiques dans des interactions simples basées sur la proxémie. Mon chiot a peur de tout Chapitre 1 Jepp va-t-il s’arranger en grandissant ? Mme Désemparée cherche à se procurer un collier antiaboiement. Elle a vu sur Internet que cela empêchait les chiens d’ameuter le quartier à chaque sortie. Elle n’est pas vraiment convaincue de son utilité mais elle s’y sent contrainte : dès que Jepp, son jeune chien, sort dans le jardin, il aboie sans cesse. Pour l’instant Jepp sort peu et seulement pour faire ses besoins. Mais les beaux jours arrivent et Mme Désemparée n’a aucune envie de se fâcher avec ses voisins ! La voilà sur le pas de la porte en train d’en discuter avec Mme Bonconseil. « J’ai une cousine qui a utilisé ce collier, elle m’a dit que c’était très efficace ! », assure-t-elle. La maîtresse de Jepp s’interroge : « Ce n’est sûrement pas agréable de recevoir des décharges électriques quand on veut s’exprimer ! Et puis Jepp est déjà peureux, est-ce que cela ne va pas le rendre encore plus peureux ? » Mme Bonconseil hausse les sourcils, ? Peureux ? Mais non, regardez comme il me fait la fête cet adorable petit chien ! ». « Mignon, peut-être, adorable... Quand je pense qu’à sept mois il n’est toujours pas propre, je me dis qu’on n’a pas su l’éduquer... », soupire Mme Désemparée. « Allons, allons, ne désespérez pas » la rassure Mme Bonconseil, « Avec le temps, tout va s’arranger ! ». Mme Désemparée est dubitative : elle voit bien que depuis son adoption le comportement de Jepp ne s’arrange pas. Il semble avoir peur de tout, même de son ombre et des reflets qu’il aperçoit dans la vitre. Il est même surpris par ses propres pets ! Si la situation n’était aussi dramatique, elle en rirait. Après avoir tourné autour de Mme Bonconseil qu’il connaît bien, Jepp se réfugie derrière les jambes de sa maîtresse. C’est auprès d’elle et elle seule qu’il se sent en sécurité. Elle est son seul refuge depuis cet abominable jour où il a quitté son enclos. Lui qui n’avait connu que le gazouillis des oiseaux et les jappements de ses frères et sœurs, il trouve cet univers rempli de sons inquiétants. Cette maison étrange est peuplée d’humains sympathiques mais bien trop bruyants à son goût. Il ne parvient à se détendre que la nuit, le reste du temps il est en alerte permanente. Il signale les dangers à ses maîtres en aboyant, mais ils semblent ignorer ses avertissements. Pire, il se fait gronder et ne sait pas pourquoi. Chaque fois que la sonnette retentit, Jepp se dresse et aboie. S’il aperçoit des visiteurs pénétrer dans la maison, il reste à distance ou part se cacher, toujours en aboyant. Il aimerait aller voir de plus près, mais il est comme paralysé. Sa tête avance mais le reste de son corps reste bloqué vers l’arrière, la queue repliée sous son ventre, lui donnant une posture étrange. On ne sait plus s’il avance ou s’il recule. Toutes ces émotions lui coupent l’appétit : il ne mange que la nuit, lorsque le reste de la maison est silencieux. Il en profite aussi pour faire ses besoins car il n’est pas question de s’accroupir ou de se mettre en danger à l’extérieur de la maison. Il le fait dans des endroits variés car il a vite compris qu’il devait s’en abstenir devant sa maitresse. Elle se fâche et lui fait peur, elle aussi. De temps en temps, Jepp soupire et retourne en rêve où il est né : le seul environnement familier qu’il connaisse et dans lequel il se sente détendu. Mme Désemparée a alors demandé à l’éleveuse si tous les chiens de cette race étaient peureux. Sa réponse l’a surprise : « Oh, en l’éduquant correctement, il va prendre de l’assurance. Ses frères et sœurs ne se comportent pas de la même manière, peut-être n’êtes-vous pas assez rassurante ? » Ulcérée, Mme Désemparée s’est sentie jugée et accusée d’être une piètre maîtresse... C’est décidé, demain, même si Jepp est malade en voiture et a peur de la rue, elle ira demander conseil au vétérinaire. Mme Désemparée se rend compte que son chien est en réelle souffrance. Son vétérinaire le confirme : Jepp est atteint du syndrome de privation sensorielle ! Le syndrome de privation Le syndrome de privation sensorielle, nommé aussi « syndrome du chenil » (Kennel syndrom) est une maladie qui touche les chiens qui se développent dans un milieu pauvre en stimulation, comme peut l’être un box dans un chenil fermé. Selon l’âge auquel ils quittent cet endroit où il ne se passe quasiment rien, leur capacité à s’adapter à la nouveauté peut être simplement perturbée ou définitivement altérée. Pourquoi les expériences précoces sont-elles si décisives pour l’organisation du cerveau ? Durant les deux à trois premiers mois de sa vie, le système nerveux se développe sous l’influence des expériences réalisées. Le réseau des cellules nerveuses se développe d’autant plus qu’il est stimulé et qu’il travaille de manière complexe, cela rend le chien capable de produire par la suite des réponses adaptées. Si le nombre d’expériences augmente, le nombre de réponses adaptées dont dispose le chien augmente aussi. Il s’agit d’un cercle vertueux : plus le chien possède d’outils pour faire face à de nouvelles situations, plus il explore son environnement, plus il a d’expérience. Théorie de la stabilisation synaptique sélective1 Comment se construit le cerveau ? Comment se développe-t-il ? À la naissance, le jeune chiot possède une grande quantité de neurones qui se connectent progressivement et entre lesquels le flux d’activité électrique du cerveau circule par le biais des synapses. Certaines de ces synapses non utilisées disparaissent, tandis que d’autres se consolident. La stimulation de certaines régions du cerveau influence le nombre de connexions, d’autant plus élevé que l’individu est stimulé. Ces connexions permettent d’établir une carte des représentations mentales et de générer les réponses appropriées à tout stimulus rencontré à l’identique. Les événements et les interactions précoces ont par conséquent une très grande influence sur le fonctionnement ultérieur du cerveau. Il est extrêmement difficile de relier un ou plusieurs gènes à un comportement donné. Il est cependant possible, par la sélection, d’obtenir des chiens timides ou craintifs, qui présentent une réaction exacerbée aux stresseurs de l’environnement. Il n’existe pas de « race » génétiquement plus peureuse ou plus courageuse, simplement des familles ou des lignées plus vulnérables au sein de chaque race. On peut encore repérer au sein d’une portée des individus plus peureux, plus réservés. Parmi ces chiens, ceux qui quittent l’élevage tardivement sont les plus touchés. En effet, leur univers n’est jamais aussi riche et stimulant que celui des chiens qui vivent dans une famille car ils ne sortent pas et reçoivent peu de visites. C’est souvent le cas des chiens de grande taille qui se vendent moins facilement et qui restent donc plus longtemps sur leur lieu de naissance. C’est également le cas de tous les « invendus » qui transitent dans des circuits parallèles de revente de chiots ou dans des animaleries, ou d’animaux nés en refuge et adoptés tardivement. Les conditions environnementales influencent le développement du chiot. Les élevages canins sont souvent des milieux assez pauvres, pour plusieurs raisons : ils sont éloignés des villes à cause des nuisances sonores ; la peur des contaminations précoces cantonne les chiots dans leur élevage et limite les visites ; l’organisation matérielle de sorties pour toute une portée n’est pas simple. La mise au point d’un programme raisonné de stimulation est difficile et peu répandue, souvent limitée à l’enrichissement du lieu de jeu sur place. Malgré ces difficultés, de plus en plus d’éleveurs sont conscients du problème et font de réels efforts pour stimuler les chiots, les sortir et leur offrir des activités variées. S’il naît dans une famille, un chiot aura plus de chances d’enrichir son expérience, à condition qu’il ne soit pas enfermé dans un garage ou une cabane au fond du jardin pour des soucis d’hygiène. La mère joue un rôle fondamental dans les capacités exploratoires de ses petits. Les chiots calquent leur attitude sur celle de la mère : si elle est peureuse et craintive, eux-mêmes seront moins hardis et restreindront leur périmètre exploratoire. Inversement, une mère calme et sûre d’elle aidera ses chiots à acquérir la capacité à rester calme. C’est une donnée dont tout éleveur doit tenir compte dans le choix des futures reproductrices. Attachement et stabilité émotionnelle La stabilité émotionnelle est une ressource qui ne s’improvise pas, elle se construit tout au long de la vie. C’est la présence de la mère qui permet au jeune chiot de retrouver son calme2. Toute situation nouvelle provoque une émotion dont l’intensité est modulée par l’état de bien-être et le sentiment de protection que le contact maternel procure. Il est difficile de les modifier en profondeur par la suite. La présence maternelle permanente jusqu’à l’âge de 2 mois est un des éléments clés de la vie émotionnelle du chien. Le syndrome de privation existe à des stades de gravité différents, de la simple phobie à la dépression profonde, en passant par des états anxieux plus ou moins marqués. Il peut évoluer de manière très variable. Certains chiots peureux à la sortie de leur élevage s’attachent très vite à leur nouvelle famille, réalisent de nouveaux apprentissages et surmontent facilement leurs difficultés initiales. Dans les formes plus graves, le chiot est trop inhibé et paralysé par ses émotions pour pouvoir explorer son environnement. Ces chiens, comme Jepp, se familiarisent progressivement à leur maison mais sont incapables de mettre une patte ou le museau à l’extérieur. Chaque sortie est une épreuve. Même dans la maison, ils sont en alerte permanente. Leur anxiété est apaisée au contact des maÐ?tres s’ils sont très rassurants. Dès que leur maître disparaît de leur vue, ces chiens sont envahis par la peur et plongent dans un état de détresse. Cela se manifeste par des hurlements, des gémissements, des actes de destruction ou de la malpropreté. La malpropreté est fréquente. Ces chiens refusent de faire leurs besoins hors de l’enceinte de leur maison car ils ne sont jamais suffisamment détendus hors de leur cadre habituel. Même apparemment apaisés et progressivement équilibrés par l’attachement qu’ils ont développé pour leur maître, ces chiots restent très sensibles et peu adaptables aux changements brutaux de leur environnement. Ils peuvent contracter des phobies brutales à la puberté, qui se généralisent très vite. Parvenus à l’âge adulte, ils adoptent des conduites autocentrées (centrées sur leur propre corps) telles que la boulimie ou le léchage d’une partie de leur corps (généralement une zone du membre antérieur). Enfin, ces chiens vieillissent mal. Ils sont atteints de troubles dépressifs et cognitifs plus tôt que la moyenne. Dans les cas extrêmes, une dépression aiguë peut s’installer. Dans cette forme grave, le chien n’est plus du tout capable de communiquer avec le monde extérieur, ni même d’exprimer la moindre émotion. Il reste immobile et figé des heures durant, mangeant à peine et ne faisant que quelques pas pour éliminer. La prise en charge doit se faire immédiatement car sa survie en dépend. Comment réagir ? Mme DÐ?semparée est surtout gênée par les aboiements de son chien. Ils sont la manifestation de l’anxiété et de l’hypervigilance de Jepp. Si elle veut les faire cesser, elle doit prendre en charge l’anxiété de Jepp et non pas se contenter d’en traiter ce symptôme. Ce qui ne marche pas Les manœuvres coercitives ou de contraintes exercées sur le chien sont vouées à l’échec. Le chiot peureux est en « mode survie ». Il a besoin de ses maîtres pour se sentir mieux, il n’a pas besoin d’Ð?tre réprimandé, rejeté ou mis à l’écart sous prétexte de lui apprendre à être courageux (et silencieux). Le collier antiaboiement est pour cette raison totalement déconseillé. Certains chiots sont capables de s’améliorer spontanément. Si le vôtre ne le fait pas et si les progrès ne sont pas visibles d’une semaine à l’autre, l’attentisme n’est plus de règle et vous devez prendre activement en charge la souffrance exprimée par le chien. À l’inverse, vouloir en faire trop et trop vite peut également être nuisible. Le meilleur remède à la peur est l’exposition. Mais elle doit être maîtrisée de manière à ne pas provoquer de sensibilisation. Ce qui marche Lors de l’arrivée d’un chien particulièrement craintif à la maison, la première règle est simple : lui offrir un lieu sécurisant et une proximité rassurante. Installez-le près de vous, proposez-lui une pièce calme qu’il peut investir quand il veut, un panier refuge dans une zone abritée depuis laquelle il peut explorer le monde, en votre compagnie d’abord, puis progressivement seul. Complétez éventuellement le dispositif par un diffuseur de phéromones de synthèse, analogues des apaisines naturelles. Les phéromones maternelles d’apaisement Les apaisines sont des phéromones sécrétées par la mère au niveau du sillon intermammaire dès le troisième jour de la vie du chiot. Elles sont perçues par le chiot lors de la tétée et lui procure détente et apaisement. Si au bout de quelques jours l’exploration ne se fait pas, il est indispensable de fournir à ce chiot une aide médicale pour lui permettre de faire ses premières expériences de manière plus sereine. Si le chiot accepte de sortir et semble curieux et intéressé, vous pouvez tenter quelques brèves sorties dans des lieux très calmes, puis progressivement plus animés. N’essayez pas d’en faire trop ni trop vite. Il existe des colliers à base de phéromones d’apaisement utiles pour aider le chien à se détendre à l’extérieur. Stimuler le chiot à en faire un peu plus permet de vaincre ses premières réticences. Il a envie de vous suivre : montrez-lui le chemin ! Ne vous privez pas de faire un peu de bruit lorsque vous déballez une friandise ou un nouveau jouet. Faites-lui découvrir tous les jours de nouveaux objets qui font du bruit, qui roulent, qui grincent. Cachez-vous dans des recoins de la maison et appelez le chien. Parsemez son chemin entre lui et vous d’obstacles à franchir : une chaise, un paillasson, un sac poubelle... Le conseil du Véto Stop aux aboiements Lorsque le chien aboie, placez-vous près de l’objet qui lui fait peur, regardez le chien, et appelez-le. S’il est dans le jardin, sortez, placez-vous à ses côtés et demandez-lui simplement de venir vous rejoindre à la maison. La prévention est-elle possible ? La meilleure prévention est celle qui se pratique le plus tôt possible, c’est-à-dire sur le lieu de naissance du chien. À l’élevage Quelques mesures préventives permettent de diminuer l’incidence de cette maladie. Ne pas mettre à la reproduction des chiennes peureuses. Repérer les chiots timides (les moins actifs). Cela permet de leur porter une attention particulière et de mettre en place immédiatement des mesures pour les stimuler et diminuer leur peur. Proposer des sorties très tôt, dès quatre semaines. Les sorties des chiots doivent respecter quelques caractéristiques. La présence maternelle est obligatoire, d’autres chiens adultes valorisent encore ces séances, ce sont autant de repères et de modèles pour les jeunes. Tout ce qui est susceptible d’être présent dans leur vie future doit faire l’objet d’une découverte : les grands espaces, les autres animaux, la foule, les marchés, les écoles, les escaliers, les ascenseurs, la rue... Il est inutile de faire un grand nombre de sorties, cinq ou six durant le deuxième mois de vie suffisent. Le simple fait de découvrir le monde dans de bonnes conditions, à l’âge où la nouveauté n’inspire pas de peur et en présence d’adultes rassurants, crée chez le chiot une vraie compétence d’explorateur. Il est difficile de définir un âge idéal pour quitter son lieu de naissance. La présence maternelle est dans tous les cas indispensable en permanence jusqu’à l’âge de deux mois. C’est l’âge que le législateur a fixé pour autoriser les cessions et vente de chiots. Chez les maîtres La première mesure à prendre est de proposer au chiot un environnement rassurant et de le laisser prendre ses marques en évitant de le laisser seul trop longtemps. Au bout de quelques jours, dès qu’il a identifié ses nouveaux maîtres comme des pôles sécurisants, il peut expérimenter le monde, dans la maison d’abord puis à l’extérieur. Le conseil du Véto Sorties précoces et maladies contagieuses On a longtemps préconisé d’attendre la vaccination complète avant de sortir les chiots. La vaccination est efficace une dizaine de jours après la 2e injection de vaccin, soit au mieux à l’âge de 3 mois. Or idéalement, l’exploration du monde commence dès le premier mois. De nos jours, le choix des lieux de sortie permet de lever cette restriction : les maladies contagieuses ont nettement reculé et sont limitées aux lieux de rassemblement de chiens ou à des zones à l’hygiène insuffisante. Sortez votre chiot tout de suite ! L’école des chiots De plus en plus de centres d’éducation proposent d’accueillir les chiots à « l’école des chiots ». L’idée est bonne, à condition que ce ne soit pas simplement un lieu fermé dans lequel s’ébattent quelques chiots sous l’œil attendri de leurs maîtres respectifs. Ce type de dispositif facilite la socialisation inter et intraspécifique (cf. chap. 7, et chap. 3.) mais n’atteint pas les objectifs que peut remplir un programme complet. Quels sont-ils ? Repérer les chiots en difficulté et apprendre aux maîtres à observer. Modérer les excès et réguler les contacts par le biais d’un chien adulte compétent. Sortir dans différents environnements. Apprendre les ordres simples : rappel, suite au pied en laisse, assis. Apprendre les jeux contrôlés. Ce qu’apprend le chiot dans une école des chiots nécessite d’être transposé dans d’autres lieux afin de permettre la généralisation des connaissances acquises. Il doit aussi pouvoir s’asseoir à la maison et dans la rue sur ordre, pas seulement sur le terrain d’éducation. Anticiper les difficultés Tout au long de la vie, il faut porter une attention particulière aux situations potentiellement stressantes pour le chien. Chez le chiot Si un chiot subit une frayeur violente alors qu’il est en situation fermée, c’est-à-dire dans l’impossibilité de s’y soustraire, il déclenchera par la suite une phobie durable de cet événement et du contexte qui y est associé. Pour prévenir ces épisodes de sensibilisation, mieux vaut privilégier les laisses longues et la possibilité pour le chiot de se soustraire à ce qui lui fait peur. Dans un premier temps, il recule ou se cache, puis il se calme et enfin revient explorer. Dans les situations très difficiles, prendre son chiot dans les bras est acceptable, à condition de ne pas le faire systématiquement et de lui permettre rapidement d’explorer par lui-même. Chez l’animal pubère La puberté est une période charnière pour le chiot peureux. Les modifications hormonales favorisent des réponses émotionnelles excessives et l’apparition de phobies (cf. « Mon chien a peur qu’on le touche »). Chez le chien adulte Certaines périodes clés sont particulièrement stressantes pour les chiens les plus vulnérables : voyage, journée à passer seul, déménagement, mise en pension, etc. Comment empêcher que cela se reproduise ? Le traitement d’un syndrome de privation est une tâche de longue haleine. Il doit être mis en place le plus précocement possible afin d’augmenter ses chances de réussite. Il est nécessaire de se fixer des objectifs précis, évalués au cours d’un suivi régulier. Le chien peut alterner des phases de progrès et des périodes de régression. Ces retours en arrière apparents sont assez décourageants mais font pourtant partie de l’évolution normale. Chaque nouvelle expérience réalisée par le chien avec succès, sans émotion visible, est un progrès. Chaque progrès est acquis et mémorisé, même si cela ne se voit parfois que plus tard. Les jeunes chiens peuvent connaître des débuts laborieux puis se mettre à généraliser les acquis et progresser beaucoup plus vite. Quand les émotions sont trop envahissantes, le chien est incapable d’apprendre. Sa mémoire est ainsi faite qu’il retient plus facilement les sensations négatives. Pour le faire progresser, il est important de le placer dans un contexte d’apprentissage favorable dans lequel il se sent bien et détendu. Selon les symptômes dominants, votre vétérinaire prescrit les médicaments les plus appropriés pour votre chiot. Considérez-les comme une sorte de béquille en attendant que la jambe guérisse. Ce sont des leviers permettant de commencer le traitement puis de le poursuivre. Le deuxième volet du traitement consiste à confronter le chien à des expériences variées afin qu’il les associe à des sensations positives et les mémorise. L’évaluation de l’intensité de la peur permet de déterminer si une expérience doit être prolongée. Les situations sont classées selon l’intensité de l’émotion qu’elles procurent au chien, les contextes sont ainsi choisis pour désensibiliser le chien. Pour bien repérer ce qui fait peur à votre chien, vous devez être en mesure de détecter les signaux associés à l’émotion et quantifier son intensité. Chaque chien exprime sa peur de manière personnelle, prenez des repères précis sur le vôtre en relevant ses changements. Aboiements plus ou moins aigus ou clairs, continus ou par rafales, d’intensité variable. Mouvements de recul, le chien va plus ou moins loin, revient en avant d’un coup ou lentement, en tendant le cou en avant. Tirer au renard : la tête est portée haute, le chien recule, croupe vers le sol en jetant sa tête en arrière. Tremblements : les frissons peuvent parcourir le corps ou bien l’agiter entièrement, être continus ou par épisodes. Postures : oreilles en arrière, queue repliée sous le ventre, croupe abaissée ; la tension musculaire est visible. Regard et forme des yeux : plus la tension augmente, plus les yeux sont arrondis, avec un regard totalement fixe ; ou fortement étirés en arrière avec un regard qui balaie rapidement tout ce qui l’entoure. Mouvements de queue : si elle est repliée sous le ventre, elle tremble ; sinon elle est portée basse et balaie lentement l’air, comme si le chien ne savait pas quel message émettre. Perte de réceptivité à vos messages : il paraît entièrement absorbé par l’émotion, comme si vous n’existiez plus ; votre intervention doit être intense pour casser cette transe. Des signes organiques peuvent accompagner l’émotion : miction émotionnelle, sécrétion des glandes anales ou plus rarement émission de selles molles. Posture d’expectative et exploration statique Ce sont deux attitudes caractéristiques des chiens atteints du syndrome de privation. Elles marquent le conflit de motivation du chien qui doit explorer une nouveauté, un lieu ou un objet. En posture d’expectative, le chien est stoppé dans son mouvement, une patte en l’air, comme si son cerveau se bloquait ; il peut rester longtemps comme ça, sans que l’on sache s’il va parvenir à finir son mouvement. L’exploration statique peut suivre cette pause, le chien avance la tête comme s’il allait bouger, mais ses pattes ne bougent pas, son corps s’allonge, la queue se tend vers l’arrière comme pour équilibrer le cou qui s’étire vers l’avant. Sur une photo, on ne sait pas si le chien avance ou recule, ce qui traduit probablement le conflit interne de son esprit à ce moment-là ! Le chiot n’est tenté de mener ses propres expériences que si son envie est plus grande que sa peur. Quelles peuvent être les sources de motivations et de plaisir de votre chiot ? Les friandises : c’est la motivation préférée des éducateurs ; simple à mettre en œuvre, elle doit être utilisée avec parcimonie, car le chiot détecte rapidement si une récompense alimentaire est à la clé ou non. S’il est bien nourri, il est nécessaire qu’elles soient exceptionnelles. De plus, le chiot peureux a rarement un fort appétit. La balle : deuxième récompense préférée des éducateurs, au point que certains chiens lui manifestent une véritable addiction. Un chien bien concentré sur son jouet peut oublier tout ce qui l’entoure et même « oublier » d’avoir peur ! Pour récupérer une balle, il est capable de franchir de nombreux obstacles, d’affronter tous les dangers ; certains maîtres rusés utilisent la balle pour l’empêcher d’aboyer : il a la bouche pleine ! Le jeu : s’il est entraÐ?nant, il crée un filtre sur le monde extérieur sans l’occulter tout à fait. Il procure un plaisir intense à certains chiens ; c’est une des meilleures activités à proposer, d’abord dans un environnement où le chiot est parfaitement détendu, puis dans d’autres lieux. Le plaisir : de voir du monde, de jouer avec d’autres chiens, de chasser, d’aller se promener ou de fréquenter un club d’agility ou de tout autre sport canin. La joie de faire plaisir à son maître : ne boudez pas votre plaisir et pensez à complimenter outrageusement votre chien dès qu’il se montre un tant soit peu hardi ou débrouillard. Votre chiot est très sensible aux caresses, verbales ou physiques. La technique de l’immersion contrôlée permet au chien de se détendre progressivement dans un univers qui, au départ, lui est hostile. Nous traitons de cette technique dans le chapitre 6. Elle n’est possible et efficace qu’en remplissant un certain nombre de conditions : le chien ne doit pas exprimer d’émotion trop intense ; une aide médicamenteuse est souvent nécessaire. la progressivité est de règle. le maître doit pouvoir être suffisamment rassurant pour son chien. Faire réaliser de nombreux apprentissages à son chien, l’obliger à se concentrer pour résoudre des problèmes, lui faire pratiquer une activité comportant certaines règles, tout cela augmente le nombre de connexions synaptiques dans le cerveau et permet au chien d’être plus adaptable dans le milieu extérieur. Vous augmentez ainsi le nombre d’outils à sa disposition. Les routines et les rituels permettent de rendre l’avenir beaucoup plus prévisible. Le chiot n’est plus obligé d’anticiper et de redouter l’inconnu. Ils agissent comme des balises au bord du chemin, permettant d’avancer sans crainte, ce qui n’empêche pas de réaliser de temps en temps quelques transgressions pour lui éviter de « s’encroûter » et maintenir une stimulation tonifiante. Le conseil du Véto Lui apprendre la propretÐ? La technique est toujours la même. Emmenez-le dans un endroit calme aussi souvent que nécessaire et attendez qu’il fasse ses besoins, au moins une fois ! Dès qu’il a terminé, le chiot est hautement récompensé (il a accompli un exploit, la récompense doit être à la hauteur) et autorisé à rentrer chez lui (ce qui constitue une récompense supplémentaire). Les fois suivantes, retournez aux mêmes endroits en repérant leurs caractéristiques. Puis, lorsque le chiot aura renouvelé plusieurs fois cette performance remarquable, emmenez-le dans des endroits analogues. Le plus dur est d’obtenir le premier pipi ! La patience est, vous vous en doutez, de rigueur. La peur du monde extérieur inclut souvent la peur de l’automobile, parfois associée au mal des transports. Les émotions sont si fortes qu’il n’est plus possible de savoir si le chien a peur de vomir ou s’il vomit parce qu’il a peur ! Il est nécessaire de combattre la peur à l’aide d’un traitement adapté et de compléter, le cas échéant, par des médicaments spécifiques du mal des transports. L’habituer à la voiture prend beaucoup de temps. Invitez le chiot à s’installer dans la voiture à l’arrêt, puis autorisez-le à en descendre dès qu’il reste calme et détendu. Proposez-lui ensuite des trajets courts et fréquents, en augmentant graduellement la durée. La destination est importante : le chien doit être content de monter dans la voiture et si vous ne l’utilisez que pour aller chez le vétérinaire ou en ville, votre thérapie est vouée à l’échec. En revanche, si à l’arrivée il peut se promener, détendu, dans un endroit calme, il finira par apprécier ces trajets. Le mal des transports rétrocède généralement à la puberté, avec la maturation du système nerveux, en particulier du centre de l’équilibre. Quand consulter ? Une prise en charge s’impose dès qu’un chiot éprouve des difficultés face à la nouveauté. Un chiot de deux à trois mois, s’il possède les compÐ?tences suffisantes, peut manifester des réactions de surprise ou de peur vis-à-vis de nouveaux objets ou dans des situations nouvelles. Son premier réflexe est de reculer et de se réfugier auprès de sa mère, c’est-à-dire vous. Très vite, il doit retrouver son calme et reprendre son exploration. Si la surprise le paralyse, s’il fuit et panique, s’il est incapable de reprendre l’exploration, alors son émotion est excessive. En bloquant les expériences qui accompagnent la croissance, ces réactions nuisent gravement à l’acquisition de comportements normaux, c’est pourquoi il faut intervenir très tôt. L’intervention est obligatoire et sans délai dans les situations plus graves : le chiot qui n’explore pas du tout, qui ne vit que la nuit ou celui qui est en souffrance manifeste. 1. J.-P. Changeux, P. Courrège et M. Danchin, 1973. 2. Lire à ce sujet l’excellent livre de Claude Beata, Au risque d’aimer. Mon chien a peur de l’orage Chapitre 2 La peur envahissante d’Éclair Éclair est un chien de chasse rapide... comme l’éclair ! À son arrivée chez son maître, M. Kipcoul, il n’avait peur de rien, au point qu’il prenait des risques. Sans conscience du danger, il fonçait droit devant lui en toutes circonstances. Son éducation a exigé beaucoup de contrôle tant il était rapide et actif, même si sa curiosité incessante le rendait capable d’apprendre vite. Les orages ? Il n’y prêtait aucune attention, les intempéries ne l’arrêtaient pas. Lors d’un violent orage, M. Kipcoul entend gratter à la porte de sa chambre. Il ouvre et voit Éclair, tremblant, la queue et les oreilles baissées. « Éclair ! Que fais-tu là ? Que se passe-t-il ? » Les coups de tonnerre l’ont-ils effrayé à ce point ? Ce serait bien la première fois, Éclair a déjà deux ans. Dans les semaines qui suivent, les orages déclenchent à nouveau des comportements de peur marqués. Il tremble, balaie du regard ce qui se trouve autour de lui, les yeux écarquillés, il cherche à se cacher. Même avec son maître le chien continue à trembler et ne se calme qu’à la fin des intempéries. M. Kipcoul est dérouté. Il a beau gronder, câliner, punir : rien n’y fait. La situation empire même : comme s’il avait un baromètre dans la tête, Éclair réagit aux changements de pression atmosphérique avant que les premières gouttes de pluie tombent. Il se montre inquiet, insistant dans ses demandes de contact et se place dans des endroits inhabituels, sous les bureaux ou même dans les toilettes. Son maître redoute de laisser son chien seul lorsque la météo est défavorable. Lors du dernier orage, en l’absence de son maître, Éclair a détruit une porte. M. Kipcoul a grondé son chien sévèrement, mais il sent bien que cela n’a fait qu’ajouter au malaise d’Éclair. Éclair se met à réagir à des bruits de plus en plus nombreux. D’abord ceux associés aux orages : le vent, la pluie forte, la pression atmosphérique élevée. Puis il s’inquiète quand les arbres se mettent à bruisser et s’agite quand il entend des détonations ou des moteurs bruyants. Certains jours, il est réticent à la promenade, comme s’il craignait d’être soumis à tous ces éléments effrayants. M. Kipcoul use de persuasion et parvient parfois à l’emmener, mais c’est pour faire demi-tour rapidement. Éclair tire en arrière, regarde autour de lui avec un air effrayé, son maître préfère rentrer à la maison. Il est à la fois résigné, désabusé et malheureux pour son chien. Éclair était un chien joyeux, il est à présent pensif, lunatique, inquiet. L’intensité de ses peurs a diminué et elles sont maintenant contrôlables. Lorsque le temps est orageux, Éclair va se coucher en tremblant sous l’escalier, il se lèche les pattes jusqu’à l’accalmie. Elles sont même marquées aux endroits où il les lèche, la peau est pigmentée, épaissie. M. Kipcoul se rend compte que son chien passe à présent beaucoup de temps à les lécher. Est-ce une lésion de la peau ? Quelle maladie touche à présent Éclair pour modifier autant son comportement ? La peur de l’orage est très répandue chez les chiens : elle concerne plus de la moitié des chiens à un moment de leur vie. Cela va de la simple gêne passagère à de profondes perturbations de la vie émotionnelle du chien. Heureusement, tous les chiens qui ont peur de l’orage ne connaissent pas une évolution aussi dramatique que celle d’Éclair. L’enchaînement des mécanismes de la peur La peur des orages peut se manifester à tout âge. Bruit, intensité lumineuse brutale, vibrations, tout concourt à déclencher une peur intense, d’autant plus que l’animal est dans l’incapacité de s’y soustraire, ce qui accentue sa détresse. Les conditions de la sensibilisation sont réunies : intensité anormalement forte du stimulus et situation fermée. La fréquence et l’intensité des réactions de peur augmentent. La peur par la suite s’autoentretient : avoir peur facilite la réapparition de cette émotion. Les étapes suivantes sont la généralisation à des contextes voisins ou à des sons comparables. Lors d’un événement traumatisant, le chien associe l’ensemble du contexte au bruit qui a accompagné l’événement, même s’il n’a aucun rapport. Puis survient l’anticipation, quand le chien se met à redouter l’apparition de ce qui lui fait peur : il identifie les signes avant-coureurs et finit par les craindre autant que le motif initial. Lorsque tout cela est cumulé, la quantité d’informations qui provoque la peur est telle que le chien vit dans un état d’angoisse permanent. La sensibilisation est d’autant plus efficace que l’animal est vulnérable et très réactif aux modifications de son environnement. Nombre de chiens très actifs, voire hyperactifs comme Éclair, sont de bons candidats à la sensibilisation. La phobie postraumatique peut survenir suite à l’exposition à plusieurs stress modérés. Aucun n’a l’intensité suffisante, c’est leurs effets conjugués qui provoquent cet état. Mis en alerte par un premier stress (le vent), déstabilisé par l’arrivée de l’orage, le chien bascule dans la panique si un autre événement survient (la surprise d’un véhicule très bruyant). Le chien acquiert de cette situation banale une forte réticence à sortir quand la pression atmosphérique est élevée ou un désir ardent de rentrer chez lui au moindre coup de vent. Les peurs ataviques Les peurs ataviques sont présentes chez tous les mammifères et trouvent leur origine dans les dangers qui les menacent depuis la nuit des temps. Ce sont des peurs innées : la peur du noir, du vide, des serpents, des araignées, des pluies violentes, du vent, de l’orage. Au cours de l’évolution, les animaux ayant ces réactions de peur ont été sélectionnés car elles étaient une garantie de leur survie. Face à ces peurs, l’animal doit apprendre à ne pas avoir peur, alors que dans les autres cas il a appris à avoir peur à la suite de traumatismes. La spirale de l’anxiété L’inquiétude qui se prolonge perturbe plusieurs mécanismes hormonaux et modifie la transmission des neuromédiateurs. Ces modifications sont responsables de l’état d’anxiété. Il est apparu dans un contexte précis et a fini par se maintenir en dehors de ce qui l’a motivé. Dans cet état de crainte permanent, le chien trouve du réconfort en se centrant sur lui-même : en se léchant, en buvant ou mangeant de manière compulsive. L’apaisement obtenu par ces comportements est réel dans un premier temps, mais il nécessite une exécution de plus en plus longue. Parfois l’activité se prolonge bien au-delà du contexte qui l’avait déclenchée. Ainsi, les personnes qui se rongent les ongles ont commencé pour surmonter un stress précis, et ont continué bien après, sans même se souvenir de la motivation première. L’état anxieux du chien induit aussi une persistance du léchage, de la boulimie ou de tout autre comportement anxiolytique. L’anxiété facilite la peur, qui entretient à son tour l’état anxieux : une aide extérieure est nécessaire pour sortir de ce cercle vicieux. Comment réagir ? Les réactions souvent brutales des chiens qui ont peur de l’orage laissent les propriétaires désemparés. Comment aider le chien sans renforcer sa peur ? Ce qui ne marche pas Câliner et caresser... renforce la peur. C’est souvent le premier réflexe : rassurer avec des paroles douces et des gestes tendres. Ce qui fonctionne pour l’enfant ne donne pas le même résultat avec le chien. L’attitude de la personne qui se baisse et caresse en parlant doucement est interprétée par le chien comme une demande d’assistance. S’il n’avait pas très peur, il découvre que vous, si. Il risque d’être vraiment effrayé et en plus, il doit vous protéger ! Punir... renforce le malaise. Ayant constaté l’échec des « méthodes douces » et fortement agacé par d’éventuels dégâts, le propriétaire le plus patient peut sortir de ses gonds et punir son chien avec sévérité. S’il est bien informé, il n’a pas recours à des punitions physiques, sinon il peut frapper le chien pour manifester sa colère. Or, une sanction intervient après une faute. Est-il fautif d’avoir peur ? Peut-il contrôler ses émotions ? Même si le chien perçoit la raison de la colère de son maître, et c’est peu probable, il ne peut rien faire pour ne pas la déclencher. Exposé à la colère du ciel associée à celle de son maître, son malaise est complet. Contraindre ne résout rien. Empêcher le chien d’aller se réfugier dans certains endroits susceptibles de lui procurer un apaisement (un placard, une salle de bains) oblige le chien à se confronter avec ce qui lui fait peur. Vous le privez ainsi d’échappatoire et de toute possibilité d’action. La peur devient panique, lors de la prochaine confrontation votre chien sera encore plus désemparé. Ce qui marche Enfermer... peut marcher ! Proposer au chien une cachette (petite pièce, salle de bains, toilettes, buanderie) à l’abri des sons et de la lumière peut fonctionner. Dans un espace réduit où les bruits sont étouffés et d’où il ne verra pas les éclairs, votre chien pourra recouvrer son calme et attendre la fin de l’orage. Les chiens sont souvent comme « nos ancêtres les Gaulois » d’Astérix, ils redoutent que le ciel ne leur tombe sur la tête ! En tout cas, ils se conduisent comme si c’était le cas : ils cherchent à avoir quelque chose au-dessus de la tête, table, Ð?tagère, auvent, etc. Placez-les dans un lieu qui permet ce genre de « protection ». Ordonnez et contrôlez. L’autorité est protectrice : votre chien doit vous sentir sûr de vous. En lui donnant des ordres simples, vous lui indiquez quoi faire, il peut s’en remettre à vous et se sentir encadré. Ces ordres (« Assis » ou « Couché ») sont connus, en général automatisés et induisent souvent des récompenses. En obéissant, votre chien se place dans un contexte connu, et donc apaisant. Donnez vos ordres calmement. Plus vous parlez vite et aigu, plus il perçoit votre tension et plus vous l’énervez. Autorisez le contact avec vous (ordonnez-le). Le chien est attaché à son maître et à son groupe. En cas de danger, il se rapproche du groupe protecteur. Le chien qui se sent en danger recrute les autres membres du groupe, par des aboiements ou des déplacements invitant à être suivi. Cela justifie aussi qu’il recherche la présence de son maître face à un danger. Ne le privez pas de ce facteur d’apaisement et, comme dit plus haut, ordonnez-lui de se placer à vos côtés, mais ne le câlinez pas. Limitez vos propres émotions. Ce type d’émotion fait l’objet de contamination, si vous avez peur, votre chien risque de vous imiter. Si vous vous énervez ou perdez patience, votre chien attribuera votre réaction à l’orage et non à son propre comportement. Cette incompréhension entretient son malaise, renforce ses émotions négatives et le prive de l’appui que vous devriez lui apporter. C’est en restant serein que vous contribuez à sa propre sérénité. La prévention est-elle possible ? La peur de l’orage est presque normale pour les chiens, pourtant la vulnérabilité de chaque individu dépend de son histoire. Différents éléments permettent de moduler l’intensité de ses réactions. L’efficacité des réponses dépend aussi de l’habitude du chien de s’appuyer sur des êtres protecteurs, habitude ancrée dès les premières expositions juvéniles. Réagir vite à l’apparition de la peur Le soutien du maître ne doit pas être différé. Il est tentant de laisser le chien s’apaiser pour qu’il apprenne. Dans le cas de l’orage, il est impossible de maîtriser l’événement ou de moduler son intensité. Si le chien y est exposé sans aide, il ne retiendra pas qu’il ne lui est rien arrivé, mais qu’il a passé un très mauvais moment et que vous n’êtes pas venu à son secours. Ne le laissez pas, intervenez tout de suite avec autorité et fermeté : par un ordre simple vous placez le chien sous votre contrôle, il se sent dirigé et donc protégé. Surveiller les signes d’aggravation : anticipation et généralisation Votre attention doit être attirée par l’apparition de mécanismes d’anticipation ou de généralisation. Ces processus indiquent que les capacités de réaction du chien ont été dépassées et que son organisme tente d’éviter de se trouver dans une situation comparable. Les informations rattachées aux orages sont très nombreuses : pression, bruits, lumières, électricité statique. De nombreux paramètres peuvent leur être rattachés, c’est ce qui rend la peur des orages si redoutable. Principe de la situation fermée Se retrouver en situation fermée peut conduire à une sensibilisation. C’est la perception du chien qui compte, pas votre regard subjectif ; s’il se sent coincé, peu importe que vous pensiez qu’il peut facilement se soustraire, lui ne le voit pas. Le simple fait d’être en laisse est une entrave qui peut créer une situation fermée n’importe où, même en plein champ. La mise à l’attache crée un contexte anxiogène et fermé qui prédispose beaucoup aux réactions de panique à tout élément stressant, dont l’orage ; Quelles que soient vos intentions, les techniques de confrontation du chien au danger comportent une contrainte qui transforme la situation en milieu fermé (aux yeux du chien) ; ce ne sont jamais des contextes favorables, au mieux ils amènent à une résignation, jamais à une familiarisation. Le chien qui ne voit pas d’échappatoire peut se montrer agressif ; l’agression peut être redirigée vers n’importe quel être présent ; un chien apeuré peut mordre la personne qui vient le détacher ! Il est nécessaire d’avoir ces éléments à l’esprit chaque fois que votre chien a des réactions de peur. Cela vous permet de transformer le contexte en offrant au chien la possibilité de se soustraire à la menace, condition indispensable pour une analyse sereine de la situation. Comment empêcher que cela se reproduise ? Les facteurs favorisant la peur des orages sont si nombreux et variés qu’il est difficile de les combattre même si nous disposons d’outils susceptibles d’améliorer le confort du chien et de son entourage. Ils sont plus simples à mettre en œuvre dans le cas de phobies du bruit, des pétards, des feux d’artifice ou des coups de feu, que dans le cas de phobies de l’orage. Ils diffèrent selon que le chien est simplement phobique ou devenu anxieux. Apaiser la peur immédiatement La peur alimente la peur. Lorsqu’elle est devenue panique, l’envahissement émotionnel s’oppose à tout raisonnement. Le chien devient inaccessible aux sollicitations, il ne perçoit plus rien ou tout au moins ne parvient plus à analyser les informations. À ce stade, il est nécessaire de lui redonner la capacité de percevoir son environnement et d’éviter l’aggravation. De nombreux produits permettent cette modulation des émotions. Homéopathie, phytothérapie, phéromones d’apaisement, nutraceutiques, psychotropes, sont des moyens d’actions qui tiennent compte de la sensibilité de chaque chien, des modalités d’expression de son stress et des autres symptômes éventuellement associés. Une fois le chien rendu réceptif, les techniques de désensibilisation peuvent être mises en œuvre. Contre-conditionnement au bruit Le contre-conditionnement consiste à associer de manière systématique un plaisir au signal qui déclenche la peur. Le son qui était à l’origine de l’émotion négative est ainsi associé à une émotion positive, incompatible avec la peur. Par exemple, au moment où retentit le bruit qui effraie le chien, son maître peut lui donner une récompense ou attraper son jouet préféré. Progressivement, le chien associe le bruit à la suite appréciée, et non plus à la peur. Attention au risque de conditionnement inversé : le chien peut développer de la peur au signal associé. S’il s’agit d’un jouet ou d’une friandise, ce n’est pas grave. S’il s’agit de sa gamelle de nourriture c’est plus embêtant. Si c’est à votre propre présence cela devient très contrariant ! Le conseil du Véto Contre-conditionnement par le jeu Certains chiens sont de très grands joueurs. Ils parviennent à un état d’excitation et d’investissement dans cette activité qui les rend indifférents à tout ce qui les entoure. Si c’est le cas de votre chien, servez-vous de cette qualité. Il faut déclencher le jeu et y faire « entrer » totalement le chien avant que le signal déclencheur de peur n’apparaisse. Votre chien doit être entièrement accaparé par son activité. Il est également important que les joueurs ne marquent aucune réaction à l’apparition du signal en cause, surtout si le chien commence, lui, à le faire. Cette technique est limitée aux chiens très joueurs. Elle réclame en outre une bonne préparation, des répétitions, souvent l’association de partenaires eux aussi préparés (ils ne doivent pas réagir au signal sous peine de ruiner la séance). Les expositions sont répétées tant que le chien marque une petite réaction, ce qui peut durer longtemps. Dans le cas de l’orage, ces techniques sont souvent difficiles à mettre en œuvre car les signaux (vent, pluie, tonnerre) sont nombreux, leur apparition est progressive : comment associer chaque signal à un plaisir ? L’habituation Le mécanisme d’habituation consiste à minimiser l’intensité des signaux déclencheurs pour les rendre si faibles que le chien n’y réagit plus. Lorsque le chien n’y accorde plus d’importance, l’intensité est augmentée graduellement, pour rester toujours en-dessous d’un seuil déclencheur. À la fin de ce processus, l’intensité normale du signal ne déclenche plus rien. Cette méthode est adaptée aux sons, par exemple. Pour les orages, différents enregistrements destinés à cette habituation existent dans le commerce, mais ils n’exploitent que les signaux sonores et en aucun cas l’ensemble des informations associées aux orages. Difficile d’avoir de « petits orages » sous la main à volonté ! Le conseil du Véto Les pétards, les coups de feu Des bruits de niveaux sonores différents peuvent être proposés : cela va du papier bulle que l’on fait éclater aux gros pétards, en passant par les petits pétards de commerce. Il est aussi possible d’agir sur la distance. Pour les coups de feu, la technique d’immersion contrôlée à distance (progressivement réduite) d’un champ de ball-trap peut être efficace. Précisons que les deux techniques que nous venons de voir demandent beaucoup de temps, de rigueur dans leur mise en œuvre et d’attention dans le réglage des signaux. Cela exige une grande disponibilité, beaucoup de patience, car les retours en arrière sont fréquents. Bref, ces techniques, bien qu’efficaces, sont difficiles à réussir. Nous décrivons par ailleurs dans ce livre de nombreuses attitudes sociales qui procurent au chien apaisement et protection. On peut se demander si le temps et l’attention accordés au chien durant la mise en œuvre des techniques de conditionnement ne lui procurent pas davantage de sérénité que la technique en elle-même... La technique de l’oubli ? Le mécanisme d’extinction, le chien « oublie » le signal et n’y réagit donc plus, est applicable pour les signaux que l’on peut éviter. Dans le cas de l’orage, il vous faudrait vous déplacer au gré des bulletins météorologiques... Dans le cas de certains bruits, bruits routiers, détonations d’armes, cela peut être envisagé, mais l’extinction est très longue et décevante dans le cas de peurs ataviques. L’attachement permis pour lever un état dépressif Nous avons vu que la qualité de l’attachement maternel durant le développement détermine la stabilité émotionnelle. Lorsque les émotions sont très perturbées, un attachement fort et apaisant constitue un élément repère très utile pour le retour de réactions mieux modulées. Au moment d’une adoption ou durant la convalescence d’un état dépressif ou anxieux, le maître doit se montrer disponible et fiable afin de procurer un appui constant sur lequel le chien puisse se reposer pour retrouver son calme. Ce sont des périodes durant lesquelles les préconisations de contrôle et d’initiatives des contacts sont momentanément mises entre parenthèses, tout comme durant les premières semaines de vie : la disponibilité est inconditionnelle. Dès que l’état émotionnel s’améliore, le maître veille à répondre de manière moins systématique afin de permettre au chien de retrouver son autonomie. Quand consulter ? Vous avez tenté d’appliquer tous nos conseils et rien ne marche ? L’envahissement émotionnel est si grand que vos messages ne lui parviennent pas ou sont mal déchiffrés. Une aide extérieure est nécessaire, il est peut-être utile d’agir préalablement sur l’état émotionnel de votre chien pour le rendre réceptif. Les choix thérapeutiques dépendent de la précocité d’intervention, de l’intensité et de la durée des signes : plus le trouble est ancien, plus il sera difficile à combattre. Mon chien a peur des autres chiens Chapitre 3 Frisson est sous tension M. Napprochepas et son chien Frisson (tout petit déjà, il frissonnait dès qu’on lui parlait) ont une vie aventureuse. Tous les jours, ils partent affronter les dangers du parc, heureusement qu’ils peuvent s’appuyer l’un sur l’autre ! M. Napprochepas attrape son manteau, la laisse et sa canne. Il ne boite pas, cette canne est son arme : il se sent bien plus fort pour affronter tous ces chiens qui viennent tourner autour de Frisson. Il a remarqué qu’ils se méfiaient davantage de lui quand il la portait. Frisson est joyeux de sortir, il aime ces moments partagés. Ils vivent des émotions fortes, parfois c’est effrayant, mais grâce à son maître, ils s’en sortent très bien. Sauf la fois où Frisson a été mordu... Ils savent bien où se trouvent les dangers, dans la rue ils ne risquent rien. Parvenus à l’entrée du parc, ils scrutent les environs avant d’avancer. M. Napprochepas tend imperceptiblement la laisse et Frisson s’arrête avant même que son maître ne le lui demande. Tous les deux balaient le parc du regard pour repérer qui est là. Les compères sont sur le qui-vive, attentifs aux mouvements, prêts à... prêts à quoi en fait ? À pénétrer dans un lieu à la fois familier et source de danger et d’émotions fortes ! Ce jour-là, les lieux semblent dégagés quand soudain tout se précipite. Un énorme chien noir surgit de nulle part et vient dans leur direction. Il fixe Frisson, « comme un hot-dog qu’il va dévorer », pense son maître ! Il s’avance d’un pas décidé. M. Napprochepas se dresse et commence à crier : « Et voilà ! Encore un chien méchant en liberté ! Les gens sont vraiment inconscients ! » Frisson sent que son maître s’agite car ce chien lui fait peur. Le maître est campé sur ses jambes, le regard fixé sur « l’agresseur ». Frisson, forcé par la laisse tendue de rester contre son maître, est inquiet de le sentir si ému. Le chien noir approche. Sa queue est souple. Sa gueule mi-ouverte laisse voir ses dents et la langue qui pend légèrement sur le côté lui donnerait presque un air sympathique, se dit Frisson. Mais cette laisse l’empêche d’amorcer un dialogue de rencontre conforme aux règles de politesse canine. Et puis Frisson sent bien que son maître a peur, car la laisse se tend plus fort. M. Napprochepas dit : « N’approche pas ! », et lève son bâton. Le chien s’immobilise, méfiant. Son corps se tend, ses antérieurs sont droits, sa croupe s’affaisse, il se met à grogner. « Je le savais, encore un chien méchant ! », dit M. Napprochepas, au comble de l’énervement. Colère et peur se mêlent, unissant le maître et son chien, l’émotion est à son comble. Le chien repart tranquillement, jugeant inutile d’insister. Le maître et son chien le regardent partir, serrés l’un contre l’autre, jusqu’à ce que la distance soit suffisante pour reprendre leur progression. M. Napprochepas est soulagé, il serre Frisson contre lui et le caresse, « Heureusement que je suis là pour te protéger, hein ! ». Il se rappelle le jour où il n’a pas été assez rapide. Frisson a été mordu et il a fallu l’amener chez le vétérinaire pour soigner ses plaies. C’est depuis ce jour qu’il prend cette canne et se méfie des chiens qu’il rencontre, surtout ceux qui sont en liberté. Il explique aux maîtres inconscients tout le mal qu’il pense des chiens lâchés dans le parc, mais ils s’entêtent à les laisser en liberté quitte à ce qu’ils s’attaquent à d’innocentes victimes. Il a beau changer ses heures de promenade, il y en a toujours un qui traîne ! Le mécanisme de cette rencontre Nous croisons tous les jours des M. Napprochepas et sans doute nous comportons-nous parfois comme lui ! Ces attitudes se construisent progressivement à notre insu. Reprenons notre récit en pointant l’enchaînement qui conduit à une situation un peu absurde. Abordons la situation du point de vue du chien. « Mon maître est très tendu » ; le chien sent l’inquiétude de son maître qui anticipe les rencontres, cela le rend nerveux sans raison objective ; « Quand un chien s’approche, mon maître a très peur ! » ; un événement banal devient stressant, même une approche accompagnée de signaux amicaux déclenche la peur du maître ; « Moi-même je ne me sens pas très sûr... » ; « j’ai été mordu par un chien, j’ai eu très peur, il m’a attaqué par surprise et j’ai été blessé » ; mélange de peur liée à la mauvaise expérience, de contamination, de difficulté à lire les messages canins, la situation devient vite alarmante ; « On a gagné ! Mon maître est content » ; les caresses et les mots apaisants confirment que la situation a été bien gérée. Désocialisation par méfiance excessive Comment le chien voit-il les autres chiens ? Quels messages perçoit-il ? Comme un chien, vous ditesvous. Sauf que la compétence en communication n’est pas innée. Après une acquisition des règles de base par le chiot avec sa maman et sa portée, le perfectionnement du langage canin exige des échanges réguliers et variés. Lorsque le chiot arrive dans sa nouvelle maison, les maîtres veulent naturellement le protéger des dangers du monde environnant, y compris des chiens adultes. Une morsure est si vite arrivée ! En admettant qu’ils souscrivent à de telles rencontres, ils sépareront très certainement les chiens au moindre grognement, interprétant celui-ci comme une vraie menace et non comme une procédure normale d’éducation du chiot. Pour peu que le chien soit peureux dès son arrivée, la faible compétence de départ devient au fil du temps une incapacité presque complète à communiquer avec ses congénères. L’illustration classique de ce phénomène, à peine caricaturale, est celle du petit chien muni d’un harnais, que le maître prend dans ses bras au moindre danger réel ou présumé, en particulier à l’approche de chiens qui ne feraient qu’une bouchée de son petit compagnon. Renforcements involontaires Lorsque M. Napprochepas caresse son chien pour le rassurer, il ne fait qu’alimenter sa peur, contrairement à son intention initiale. De même, s’il se tient aux côtés de son chien en tendant la laisse, il l’encourage involontairement à se montrer agressif avec les chiens qu’ils rencontrent. Nous verrons que ces renforcements sont très nombreux dans les situations d’interaction, et que les différences entre les langages canin et humain favorisent ce type de situation. C’est en particulier le cas des alliances involontaires, exprimées par le positionnement dans l’espace et par tous les messages transmis par la laisse. Les principales causes des rencontres difficiles La peur intervient souvent, mais d’autres causes se conjuguent pour aboutir à des rencontres difficiles. La peur liée à un événement traumatisant (mésaventure avec d’autres chiens) survenu lors d’une période sensible ; la difficulté de communiquer : qu’il s’agisse d’un manque d’apprentissage, d’une impossibilité physique ou de « l’effet laisse » du maître qui empêche les contacts. le besoin instinctif de protection du maître : cette motivation à la protection peut être alimentée par la peur. la revendication d’une ressource essentielle pour le chien : son maître ; même si la personne rencontrée n’est pas perçue comme menaçante, certains chiens peuvent être jaloux de leurs prérogatives et interdire l’approche de leur maître ou maîtresse comme ils interdiraient de s’approcher de leur os ; si le chien est peureux, le maître (et sa présence proche) devient encore plus précieux. les antipathies naturelles : comme les humains, les chiens ont « leurs têtes », des chiens ou des personnes qui ne leur « reviennent pas ». Le conseil du Véto La peur des bâtons La peur des bâtons, ou de tout objet y ressemblant (le balai par exemple), est très répandue chez les chiens. Ont-ils tous été battus ? Assurément non ! Mais tous les chiens se méfient de cette arme potentielle. Selon leurs expériences, cela peut leur inspirer une peur justifiée. En tout cas, chaque fois que vous avez un objet de ce genre à la main, regardez bien les chiens, ils pourraient vous prendre pour un agresseur et se défendre à votre approche, quelles que soient vos intentions ! Comment réagir ? La plupart des réactions spontanées des maîtres semblent renforcer la peur du chien. Nous devons d’abord décomposer les signaux à l’origine de ces malentendus. Dans un deuxième temps nous pouvons réfléchir à des attitudes qui seront efficaces et qui pourront être répétées pour devenir automatiques. Ce qui ne marche pas Comme M. Napprochepas, les maîtres adoptent instinctivement des attitudes contre-productives. Anticiper : si le maître cherche les chiens avant même qu’ils ne s’approchent, le sien est mis en alerte dès le début de la promenade. Adopter les antipathies du chien : le maître a repéré les chiens qui font peur à son chien, il fait ce qu’il peut pour les éviter, annulant ainsi toute chance de progrès. Accepter et se résigner : la réaction du chien est posée comme irréversible, provoquée par un événement traumatisant. Alerter son chien par une réaction excessive : le chien sent la tension de son maître, il l’attribue à la présence de l’autre chien ; le fait qu’elle cesse quand il s’éloigne conforte son analyse. Agresser les maîtres : le chien se sent recruté par le comportement agressif du maître à l’égard des propriétaires des autres chiens, il prend naturellement le parti de son maître, d’autant que celui-ci le serre contre lui comme pour lui demander assistance. Caresser son chien à la fin de l’interaction : cette caresse devient un remerciement de l’aide fournie, une validation globale de la réaction du chien, sa peur et son agressivité éventuelle ; comme toute récompense, elle a tendance à renforcer ce comportement. Ce qui marche Résumons le message du maître à faire passer au chien, les informations utiles en présence d’un chien qui lui fait peur. Je n’ai pas peur. Je te protège. Je contrôle la situation. Je comprends ton émotion, je la prends en compte mais ne la partage pas. Sous ma protection tu peux te détendre et apprendre. Nous continuons notre chemin sans perturbation. La communication posturale permet de faire passer simplement ces différents messages. Elle nécessite de la préparation : l’obéissance à l’ordre « Assis » doit être automatisée. Pour que le chien réponde vite et facilement à cet ordre, il doit être au début associé systématiquement à une récompense, alimentaire au début de l’apprentissage si le chien est gourmand, ou plus simplement des félicitations sur un ton très enjoué. Dans le contexte d’autorité, la récompense n’est plus donnée, c’est pourquoi la préparation est indispensable. Voyons maintenant comment réagir en présence d’un chien qui effraie le vôtre : Ne vous énervez pas, ne parlez pas, ne précipitez pas vos gestes ; si le chien vous fait peur (ça peut arriver !) faites demi-tour calmement et éloignez-vous lentement. Si la rencontre a lieu, tirez sur la laisse pour placer le chien derrière vous, placez-vous entre votre chien et l’intrus ; retournez-vous face à votre chien en tournant le dos à l’autre chien, et restez bien droit ; vous le protégez physiquement. Dites simplement le nom de votre chien et « Assis » ; moins vous parlez, moins vous faites passer d’émotion ; plus vous êtes autoritaire et déterminé, plus vous êtes protecteur. Laissez votre chien observer sans commenter ses réactions, contentez-vous de le faire asseoir s’il se lève ; attendez que sa tension retombe. Quand votre chien est plus calme et vous regarde, il est prêt à vous suivre ; tournez-vous et reprenez votre chemin, sans toutefois aller directement vers l’autre chien. En répétant la manœuvre plusieurs fois, vous créez une routine apaisante permettant l’observation. Vous verrez d’ailleurs qu’à l’approche d’un chien, le vôtre dirige son regard vers vous, pour voir comment vous allez vous comporter. Lorsqu’il le fera sans manifester d’émotion, vous pourrez poursuivre votre chemin sans réagir du tout. Votre chien aura appris à ne pas avoir peur d’un de ses congénères. La prévention est-elle possible ? Les mesures de prévention sont possibles et sont appliquées le plus précocement possible dans la vie du chien. Les expériences précoces La période de socialisation court de la deuxième semaine à l’âge de 2 mois. Au cours de cette période, le chien apprend à identifier d’abord sa mère, puis les membres de son espèce. Les contacts précoces et répétés avec sa mère et ses frères et sœurs permettent l’acquisition des bases du langage et de l’étiquette canine. Durant l’adolescence, le jeune chien a encore besoin de vivre de nombreuses interactions. Les adultes lui imposent le respect des codes canins, il apprend à approcher les autres membres du groupe en position basse et respectueuse. Il perfectionne et affine les signaux, enrichit ses messages. Ces initiations sont indispensables pour qu’il devienne un adulte capable de lire et de répondre correctement aux messages de ses pairs. Lors de cette période, les chiens se comportent comme de vrais ados et sont volontiers provocateurs. Ils risquent de se voir plus ou moins sévèrement remis à leur place par d’autres chiens adultes. Dans l’idéal, ces remises en place se passent dans un contexte où les chiens sont libres de leurs mouvements et peuvent prendre la distance souhaitée. Si ce n’est pas le cas, ou si le jeune adolescent protégé par son maître se sent vainqueur de ce type de confrontations, les échanges futurs auront lieu sur un mode encore plus assuré et provocateur. Chaque rencontre donnera lieu à de furieux aboiements, poils hérissés, faisant penser que le chien a peur des autres chiens. Lors de la période adulte, l’entretien des compétences est indispensable à leur maintien. Un chien qui ne rencontre jamais d’autres chiens perd ses acquis et finit par avoir peur des autres. Attention, les rencontres doivent avoir lieu en toute liberté de mouvements ! Croiser des chiens en laisse est tout à fait insuffisant. Lors des expériences ultérieures, l’importance des mauvaises rencontres est souvent exagérée. Bien souvent les accrochages avec d’autres chiens révèlent un manque de compétence en communication. Le chien agressé a été incapable d’émettre les signaux attendus par son agresseur, qui auraient changé la relation, ou bien il a émis lui-même des signaux non conformes à l’étiquette canine. Si ces mésaventures se produisent lors de périodes de sensibilité particulière (par exemple la puberté, du fait des modifications hormonales associées), elles peuvent être durablement mémorisées. Analyser la communication canine Vous avez peut-être peur de lâcher votre chien en présence d’autres chiens. L’excès de précaution prive le chien de contacts formateurs et structurants. Mieux vaut analyser le comportement des autres chiens, puis décider ou non de laisser les interactions avoir lieu, plutôt que les empêcher totalement. Dans une rencontre de chiens, les échanges de signaux sont très rapides, complexes, ils ne sont pas tous accessibles aux humains. Nos capacités d’audition et d’olfaction, limitées par rapport au chien, nous privent d’une partie importante des échanges. Rassurezvous, il en reste assez pour une lecture efficace ! Le sens du message est constitué de l’association de plusieurs signaux. En observant les différentes postures du chien, vous définirez le registre sur lequel les échanges ont lieu : amical. défense, agression. neutralité, indifférence. provocation. rupture de communication. Chaque registre peut être nuancé par des émotions diverses : peur, colère, joie, curiosité... Il faut tout regarder à la fois et ce n’est pas gérable ! Il vous reste à décomposer vos observations pour les rendre interprétables : l’impression d’ensemble est importante ; votre première analyse se fonde sur des éléments perçus de manière inconsciente, tenez-en compte. D’où vient cette impression ? Au fil de vos progrès, ces intuitions seront de plus en plus vérifiées ; la tension générale du corps : la décontraction donne une démarche souple, balancée ; la tension donne de la raideur, de la hauteur, des mouvements saccadés ; la tête reste droite et haute si l’intention est de s’imposer, elle est portée souple et mobile si l’intention est neutre, elle est basse si le but est de se placer en-dessous ; la peur s’exprime par des oreilles couchées en arrière, des yeux arrondis, grands ouverts, les babines tirées en arrière, la queue basse et la croupe sous le corps, le poil hérissé, d’éventuels tremblements. Le mouvement se fait le plus souvent vers la prise de distance ou la fuite quand elle est possible ; l’agressivité est marquée par la tension, les yeux tirés en arrière, les oreilles pointées en avant, les babines tendues découvrant les dents, le nez retroussé ; le mouvement est direct, saccadé, rapide ; le poil peut aussi être hérissé ; soumission et apaisement se lisent dans des postures basses : oreilles et tête basses, regard dirigé de bas en haut, corps affaissé, queue mobile portée basse, mouvements lents ; la trajectoire est courbe, évitant l’affrontement direct ; l’autorité est marquée par des postures hautes mais sans la tension de l’agressivité, le chien reste détendu dans un premier temps ; une invitation au jeu est faite de mouvements alternés d’avant en arrière, de simulacres de démarrage de course, de postures croupe en l’air, le tout avec un corps entièrement souple et détendu ; la rupture du contact visuel : le chien qui regarde ailleurs, en tournant lentement la tête, le regard dans le lointain et en hauteur, peut marquer le refus d’une proposition – de jeu par exemple – ou permettre d’apaiser un chien qui a l’air inquiet. Ces signaux s’inscrivent dans un dialogue : les chiens se répondent et ajustent leurs signaux en fonction de ce qu’ils ont perçu. C’est en multipliant les observations, en focalisant votre attention sur des éléments précis, que vous créerez vos automatismes. Entraînez-vous avec votre chien ! Vous connaissez son humeur, ses préférences, ses émotions, vous savez anticiper ses intentions, alors familiarisez-vous à sa façon de les exprimer. Vidéo : la vidéo permet de revoir les scènes en regardant successivement différentes parties du corps de chaque interlocuteur ; toute l’alchimie de l’échange apparaît alors. Club canin : c’est un cadre protégé, l’espace de fuite est maîtrisé, les chiens sont connus, les moniteurs sont là pour vous aider à déchiffrer les échanges, pour commenter les interactions. Vos interventions sont toujours beaucoup moins utiles que vous le pensez ! Rappelez-vous que si votre chien est en train de se soumettre, il peut changer d’avis s’il sent votre soutien, et s’il domine, il peut se montrer plus entreprenant avec votre aide. Votre présence physique risque de briser l’équilibre en train de s’installer. Vous devez rester observateur. Vous pouvez simplement accélérer la prise de distance et le repli si vous sentez que votre chien préfère cette stratégie face à un chien envahissant ou insistant. Voyons comment utiliser la laisse dans cette optique. La laisse : un outil simple en apparence seulement Quoi de plus banal que de promener son chien en laisse ? Cet outil indispensable, qui garantit une certaine sécurité, permet de garder le contrôle (même si celui qui impose sa volonté n’est pas toujours celui qui le croit !) et d’éviter les accidents en zone urbaine. Du point de vue du chien, ce lien marque la proximité affective durant les activités communes. Le chien sent que son maître participe, qu’ils font équipe. Face à l’adversité, la complicité amène la solidarité : chacun se sent plus fort. Attention, ce n’est pas toujours votre intention mais c’est ressenti comme tel ! La laisse peut transmettre de nombreuses informations à la seule condition qu’elle ne serve pas de traction continue ! Les nuances dans la tension donnent des indications en fonction des événements. Par exemple, une tension brève et sèche (un « coup de sonnette ») peut marquer la désapprobation. Pour cela, il est nécessaire de compléter l’information par un ordre simple. C’est la congruence et la cohérence des signaux, l’association voix plus modulation de tension dans la laisse qui permet au chien de comprendre le signal et d’y répondre. N’oubliez pas que la laisse transmet aussi toutes vos émotions... Et si votre chien tire lui-même sur la laisse, exerçant sur vous une contrainte si vigoureuse que vous ne pouvez plus utiliser cet outil ? L’usage du harnais de marche ou du collier licol peut présenter certains avantages. Le conseil du Véto Le collier licol Le collier licol ressemble à un vrai licol relié à une petite laisse. La traction, même légère, exercée sur la laisse, resserre le licol autour du museau du chien. Si celui-ci continue à avancer, sa tête est déviée sur le côté, ce qui le gêne considérablement et le pousse à ralentir. Quand le chien ne tire pas, aucune pression ne s’exerce sur son museau. Le chien comprend très vite la différence. Prévoyez une période d’apprentissage afin que le chien se familiarise avec le collier et n’essaie pas de le retirer. La taille doit être parfaitement adaptée : trop serré le licol ne joue pas son rôle, trop lâche le chien risque de le perdre. En cours de marche, la traction exercée sur la laisse ne doit pas être trop importante car ceci entraînerait des rotations trop brusques de la tête. Ce procédé qui permet de diriger le chien du bout des doigts, est indiqué pour les personnes qui se sentent en difficulté dans cet apprentissage de la marche en laisse et qui ont du mal à contrôler leur chien lors de rencontres. Comment redonner confiance ? Qu’il se soit développé sans contacts canins, ou que son mode de vie l’ait progressivement éloigné de ses congénères, il est paralysé par la peur quand un chien approche. Que faire ? Préparer le chien aux rencontres Le chien qui a peur des autres vit à l’isolement ou sans contact direct avec les chiens. Pour rompre avec ces stratégies d’évitement, vous devez organiser des rencontres. Choisissez le lieu : le site est neutre, aucun des chiens ne doit sentir de prérogative particulière ni défendre un accès ; l’endroit n’est pas associé à des expériences difficiles ; le lieu est sécurisé, en cas de fuite, le chien ne peut pas se mettre en danger ; votre chien est à l’aise dans cet endroit. Un lieu de promenade clôturé ou éloigné des routes peut faire l’affaire. Aucun des chiens n’y est chez lui, mais ils peuvent être familiers du site. Le jardin personnel de chacun est à éviter, les actions de garde risquent de perturber la relation. Choisissez les chiens : le ou les partenaires sont connus pour leur équilibre et leur compétence relationnelle ; ils ont déjà montré leurs capacités à interagir pacifiquement avec d’autres chiens ; ils n’entrent pas dans une catégorie que votre chien redoute : taille, couleur, race, âge... ils sont parfaitement sous le contrôle de leur maître, notamment pour le rappel en toute circonstance ; leur maître est compétent en matière canine, il est capable de déchiffrer les codes canins et d’identifier les intentions de son propre chien. De tels chiens rodés aux interactions canines sont nombreux dans les clubs canins, notamment ceux des moniteurs du club. Choisissez votre attitude : La laisse est proscrite : votre chien doit se sentir libre et autonome, ni soutenu ni contrarié. Vous n’intervenez pas du tout, vous observez à distance, sans vous tourner vers la scène de rencontre ; Si vous souhaitez arrêter l’expérience, c’est le chien partenaire qui est rappelé. L’interaction doit se dérouler jusqu’à sa conclusion : activité commune ou séparation à l’amiable ; en tout cas la durée n’est pas limitée. De nouvelles rencontres permettent la mise au point des codes communs ; les chiens se mettent d’accord de plus en plus rapidement, au gré de l’amélioration des messages émis par votre chien, de la qualité du dialogue qui s’instaure. Le conseil du Véto Races de chiens et communication Du fait de singularités morphologiques, certaines races semblent éprouver plus de difficultés à comprendre et à se faire comprendre des autres chiens : yorkshire terrier, rottweiler, boxer, bouledogue, sharpei... Parfois les interventions humaines en sont responsables : coupe des oreilles ou de la queue, désormais interdites, privaient les chiens de signaux de base. La sélection morphologique joue aussi un rôle par modification des expressions faciales ou corporelles. Ces chiens doivent plus que les autres côtoyer des chiens de toutes races durant leur développement, entre 1 et 9 mois, pour prévenir les difficultés relationnelles. La castration : mythes et indications La castration est conseillée pour de nombreux cas de troubles comportementaux, les relations entre chiens en particulier. Tient-elle toujours ses promesses ? La stérilisation peut avoir une influence positive dans quelques cas : Le chien « neutralisé » est souvent mieux toléré par les autres chiens, recevant moins de menaces, il se sent plus à l’aise. Les cycles sexuels des femelles et leur influence sur les mâles induisent de grandes variations de tolérance sociale et d’irritabilité. La suppression de ces cycles rend les relations plus régulières et moins tendues. Mais les réponses sont individuelles et très peu prévisibles. Les améliorations concernent peu de sujets, la stérilisation n’est donc pas une solution à mettre en œuvre de manière précoce. Quand consulter ? Vous avez commencé à mettre en application les différents conseils. Si les difficultés persistent, ne vous découragez pas. L’aide d’un professionnel, un regard extérieur, la prise en charge de l’anxiété dont souffre peut-être votre chien peuvent vous permettre de franchir des étapes supplémentaires vers la réussite. Quand ne faut-il pas tarder ? Quand la peur devient un obstacle à l’apprentissage, empêchant les mises en situation obligatoires pour progresser : si le chien refuse de sortir, les rencontres deviennent impossibles. Quand l’anticipation empêche de mener une vie normale : vous êtes obligé de sortir dans des lieux et à des heures désertés par les autres chiens. Quand la peur contamine d’autres moments au point de les gâcher : notamment les sorties qui deviennent une épreuve et non plus un agrément. Mon chien a peur de rester seul Chapitre 4 Orphée pleure dès que sa maîtresse part... Mme Jereviens doit faire ses courses. C’est avec une angoisse non dissimulée qu’elle s’apprête à sortir. Elle surveille du coin de l’œil sa chienne Orphée qui la regarde d’un air misérable et tremblant. Tout le corps de sa petite chienne exprime la peur, le désarroi et la tristesse. Mme Jereviens a le cœur serré. Elle sait qu’Orphée est malheureuse durant son absence. Sa voisine l’entend aboyer plaintivement les rares moments où Mme Jereviens quitte la maison sans prendre Orphée. « Je reviens, ma toute belle, soit sage, je n’en ai pas pour longtemps. » Sur ces mots, Mme Jereviens claque la porte et part précipitamment pour revenir au plus vite. Les choses n’ont jamais été simples pour Orphée. Quand Mme Jereviens avait visité le refuge, elle était tombée tout de suite amoureuse de cette petite chienne dont on lui avait raconté le passé tumultueux. Séparée très tôt de sa mère, récupérée par un négociant en chien véreux qui avait été interdit d’exercer par les services préfectoraux, elle avait fini par échouer au refuge avec ses frères et sœurs. Attachante, son regard donne tout de suite envie de la câliner. C’est ce qui avait plu à Mme Jereviens dès le premier contact. Elle ne savait pas alors à quoi elle s’engageait... Orphée, très peureuse, s’était vite mise à suivre sa nouvelle maîtresse comme son ombre. Mme Jereviens ne pouvait faire un pas dans la maison sans qu’elle la suive. Au fil du temps, Orphée avait acquis une certaine autonomie. Les horaires de travail de sa maîtresse étaient réguliers, la maison était assez calme et le monde assez prévisible pour que la chienne reste seule quelques heures. Mais depuis quelques mois, tout est perturbé : Mme Jereviens a dû déménager. La chienne ne s’y habitue pas. Comme au début, elle demande constamment des contacts et ne supporte plus de perdre sa maîtresse de vue. Tous les bruits la mettent en alerte, elle ne parvient à dormir que si elle touche Mme Jereviens, sa truffe sur son pied. Pour Mme Jereviens, tout est clair : « Ça lui rappelle des expériences traumatisantes, elle pense que je vais à nouveau l’abandonner », se dit-elle. Mme Jereviens est inquiète. Elle se rend compte que cela va devenir difficile car elle réduit au minimum les sorties pour ne pas faire souffrir sa chienne. Mais même en sa présence, Orphée a l’air malheureux et est en quête perpétuelle de contact. « Je ne peux pas en faire plus », soupire-t-elle. La relation se dégrade. La chienne est envahissante et rien ne semble lui amener de réconfort. Mme Jereviens est la cible des railleries de ses amies. « C’est toi qui la rend comme ça à force de tout lui passer ; tu pourrais la lâcher un peu, elle est grande maintenant, etc. » Ces commentaires la font douter : est-elle responsable du comportement de la chienne ? Pourtant dès qu’elle essaie de ne plus l’assister, la chienne paraît encore plus mal. La maîtresse réagit de manière variable, tantôt repoussant vivement la chienne avec colère, tantôt la câlinant encore plus pour s’excuser. La chienne en vient à redouter les réactions de sa maîtresse. Comment débloquer cette situation ? Comment en sont-ils arrivés là ? L’histoire d’Orphée montre un enchaînement d’événements déstabilisants. Bien que l’intervention de sa maîtresse ait été salutaire, son émotivité reste très forte et réduit beaucoup ses capacités d’adaptation. Mécanismes de l’anxiété À la base de l’anxiété, il y a souvent un événement perturbant les mécanismes naturels d’apaisement. Dans le cas d’Orphée, c’est à la fois la privation subite de la présence maternelle apaisante, associée à une plongée brutale dans un monde inconnu et hostile, qui a constitué le départ douloureux de la chienne. Elle a gardé de cette épreuve une difficulté importante à contrôler ses émotions et à retrouver son calme après un stress. L’anxiété est une peur diffuse, sans raison précise. Pour faire face à un danger virtuel pouvant surgir à tout moment, une tension permanente s’installe, avec une hypervigilance marquée : chaque signe extérieur est repéré et évalué. Beaucoup de ces signes sont perçus comme annonciateurs d’un danger redoutable. Les mécanismes de l’hyperattachement Dans le cas de forte anxiété, le réflexe du chien est de se rapprocher de son être d’attachement. Lorsqu’il est chiot, il s’agit de sa mère. En l’absence de la mère, le maître ou la maîtresse, pour peu qu’ils se montrent bienveillants et rassurants, jouent ce rôle de tuteur. Un attachement de qualité permet à l’anxiété de diminuer dès lors que la proximité est installée. Orphée ne quitte pas sa maîtresse d’une semelle parce qu’elle est anxieuse et qu’elle seule est capable d’apaiser ses émotions. Mme Jereviens agit comme un médicament et Orphée a besoin d’une perfusion continue. On retrouve fréquemment cette recherche de proximité chez les chiens qui ont subi des stress importants ou qui sont désorientés par certains événements. Généralement, les tensions s’apaisent au bout de quelques jours, l’anxiété disparaît naturellement. Dans les cas les plus importants ces chiens ont besoin d’être aidés. Le conseil du Véto Surveillance ou dépendance ? Votre chien vous suit tout le temps. Vous arrive-t-il de buter sur lui ? Souvent ? Alors il n‐?est pas derrière vous ! Il anticipe vos déplacements, il s’arrange pour que vous ne puissiez pas lui fausser compagnie. C’est un signe de calcul, peu compatible avec l’envahissement émotionnel de la peur ou de la détresse. Ce chien vous surveille, ou plutôt veille sur vous. C’est très différent puisque dans ce cas c’est lui qui pense avoir le devoir de vous protéger. Montrez-lui que sa présence n’est pas indispensable. Des étapes de vie qui peuvent déstabiliser L’attachement que noue le chien avec son maître est d’autant plus fort que la détresse initiale est grande. Cela explique pourquoi des chiens pris au refuge après des expériences traumatisantes, et le déracinement en est un, nouent aussi vite des relations fortes avec leur « sauveur ». Le chien devient autonome lorsqu’il a acquis suffisamment de ressources internes pour limiter l’intensité de ses émotions. La peur de la solitude existe-t-elle ? Aucun individu n’aime être seul. Le chien peut cependant rester quelques heures seul, et prendre son parti de cette solitude forcée pour peu qu’il y soit habitué. Certains chiens plus sensibles et qui ne disposent pas de cette expérience ont pu vi