Guide pratique du comportement du chien: Votre chien vous parle !
Edith Beaumont-Graff, Nicolas MassalVotre chien urine sur le tapis du salon. "Le ferait-il exprès pour vous embêter ?" En promenade, il tire tellement sur sa laisse que vous n'arrivez pas à le retenir. "Cherche-t-il à vous dominer?" Laissé seul toute la journée, il aboie sans discontinuer ou saccage l'appartement. "Pourquoi est-il incapable d'être sage ?"
Un grand nombre de difficultés entre maître et chien relèvent de problèmes de communication. Êtes-vous sûr de bien comprendre ce qu'exprimé votre chien ?
À travers 12 séquences de la vie quotidienne, ce livre vous invite à découvrir comment "fonctionne" un chien : Quelles émotions ressent-il ? Que peut-il mémoriser ? Comment apprend-il ? Quels sont ses codes sociaux et son organisation hiérarchique ?
Lui apprendre la propreté, doser récompenses et punitions, le faire obéir aux ordres, mieux gérer les séparations, le faire marcher en laisse sans qu'il tire, lui faire rapporter un objet... Vous trouverez aussi dans ce guide des outils, trucs et techniques pour bien vous faire comprendre et prévenir d'éventuels troubles du comportement.
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Dr Edith Beaumont-Graff et Dr Nicolas Massal Votre chien vous parle ! Guide pratique du comportement du chien 2006 licence Groupe Eyrolles 61, bd Saint-Germain 75240 Paris cedex 05 www.editions-eyrolles.com Le code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit en effet expressément la photocopie à usage collectif sans autorisation des ayants droit. Or, cette pratique s’est généralisée notamment dans les établissements d’enseignement, provoquant une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd’hui menacée. En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’éditeur ou du Centre Français d’Exploitation du Droit de Copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. © Groupe Eyrolles, 2006 ISBN :2-7081-3637-2 Composé par PCA Achevé d’imprimer : La Source d’Or N° éditeur : 3322 Dépôt légal : avril 2006 Imprimé en France Sommaire Prologue Remerciements Qui sommes-nous ? Où trouver les réponses à vos questions ? Chapitre 1 - Premier apprentissage, première difficulté de communication... Le point de vue de Mme Nefaispaslà Le point de vue de Jep (’pas pu me retenir) PRENONS DU RECUL Le développement progressif du chiot Que comprend-il ? Les odeurs d’appel Les conséquences inattendues des punitions Une pluie de conseils QUELQUES OUTILS Se fixer des objectifs Apprendre la propreté à son chien L’art de la punition Pourquoi punir ? Que punir ? Comment punir ? L’efficacité des récompenses Éviter les ordres négatifs IDÉES REÇUES Chapitre 2 - Les malentendus gâchent les relations Le point de vue de M. DureJournée Le point de vue de Jeb (’bien dormi) PRENONS DU RECUL Les demandes d’attention du chien « Parler » ne suffit pas La naissance de quiproquos La punition QUELQUES OUTILS Transmettre des; messages efficaces Retenir l’attention du chien Délivrer un message clair Adopter une attitude cohérente Terminer la communication Enseigner demande de la constance « Non ! », c’est « Non ! » Quelques pistes pour récupérer un objet Savoir mettre fin à une punition IDÉES REÇUES Chapitre 3 - La famille s’agrandit Le point de vue de Mme FairePart Le point de vue de M. FairePart Le point de vue de Youpi (la famille s’agrandit !) Le point de vue des amis (et des parents de monsieur) Le point de vue des amis (et des parents de madame) Le point de vue de l’enfant à naître PRENONS DU RECUL Amour et protection Le renforcement des liens affectifs Les comportements protecteurs La jalousie Le léchage, les caresses et les offrandes alimentaires Le risque dans le jeu Les « conseilleurs » Le chien face au nouveau-né Une situation exceptionnelle mais exceptionnellement dangereuse QUELQUES OUTILS Un bilan nécessaire La hiérarchie du groupe social Les places relatives de l’enfant et du chien En cas de nervosité du chien Réaliser une coalition enfant/parents Gérer les moments de contact Associer la présence de l’enfant au plaisir Pouce ! Je suis dans mon panier Enseigner le langage canin aux enfants Quand consulter un vétérinaire ? IDÉES REÇUES Chapitre 4 - Le jeu comme base de l’éducation Le point de vue de Titom Le point de vue du père de Titom Le point de vue de Toufou Le point de vue des promeneurs PRENONS DU RECUL L’accueil Les signaux de jeu Les fonctions et l’utilité du jeu L’éducation de base Le perfectionnement des relations sociales « Joker ! » La récompense et la motivation Jeux et hiérarchie Le déclenchement et la fin du jeu Durant le jeu Excitation, hyperactivité Les rituels d’apaisement La coalition au secours de l’autorité Le refus de revenir QUELQUES OUTILS L’apprentissage par le jeu Les jeux à déconseiller Les jeux utiles Communiquer s’apprend grâce aux jeux avec d’autres chiens Comment éviter que le chien saute sur les gens pour les accueillir ? Le rappel en promenade IDÉES REÇUES Chapitre 5 - L’éducation du chien dans sa famille Le point de vue de Mme Débordée Le point de vue des enfants Le point de vue de M. Débordée Le point de vue de Fastoche PRENONS DU RECUL Le chien vu comme un enfant Le repas familial Le repas du chien Le jeu avec les enfants L’initiative des contacts QUELQUES OUTILS Prendre le contrôle du chien Organiser les repas Écarter l’idée de partage Définir des modalités de distribution Manger en premier Ne pas regarder le chien manger Donner à table Franchir les portes Caresses imposées, caresses tolérées Intervenir dans les jeux Comment réprimander un enfant en présence d’un chien ? IDÉES REÇUES Chapitre 6 - Conflits entre chiens - hiérarchie et codes sociaux Le point de vue de M. Justice Le point de vue de Xena Le point de vue de Doggo PRENONS DU RECUL L’adoption d’un deuxième chien L’éducation d’un chiot par ses pairs La puberté et l’insertion dans la hiérarchie La naissance de l’ambiguïté L’interruption des conflits Les codes sociaux Le code canin de bonne conduite Comment un chiot apprend-il la posture de soumission ? Le jeu des alliances QUELQUES OUTILS Organiser un groupe Prévenir les conflits canins Les chiens adultes : des éducateurs indispensables Apprendre à s’arrêter : la base des relations sociales Quelle attitude adopter en cas de conflit entre chiens ? IDÉES REÇUES Chapitre 7 - Promenade sportive Mme Attendsmoi promène Cacou Cacou promène Mme Attendsmoi PRENONS DU RECUL L’utilité des promenades Un monde d’odeurs L’exploration orale et la coprophagie Les rencontres avec les chiens étrangers Les rencontres avec les personnes étrangères Qui promène qui ? QUELQUES OUTILS Travailler le rappel En commençant tôt En commençant tard La marche en laisse La laisse est un outil de communication Focaliser l’attention du chien sur son maître Une leçon n’est pas une corvée La laisse à enrouleur Pourquoi les chiens tirent-ils sur leur laisse ? Les rencontres entre chiens Rassurer un chien apeuré en promenade IDÉES REÇUES Chapitre 8 - Éducation et dressage Le point de vue de M. Rexaupied Le point de vue de Mme Rexaupied Le point de vue de Brutus PRENONS DU RECUL Pourquoi dresser un chien ? Les avantages des rencontres en liberté Ce qui passe par la laisse Observer les autres maîtres et leurs chiens Imitation Qu’est-ce qu’un ordre ? Et une fois à la maison ? QUELQUES OUTILS Apprendre son nom et initier au rappel Les conditions de la réussite Le risque d’apprentissages inverses Récompenses et punitions Apprendre au chien à s’asseoir Comprendre l’ordre Comment récompenser ? Quand récompenser ? IDÉES REÇUES Chapitre 9 - La victoire quotidienne du chien sur le facteur La scène vue par le facteur Mme Décibelle est bien gardée La victoire quotidienne de Jem (mon facteur) PRENONS DU RECUL La répétition permet l’anticipation Le renforcement quotidien L’alliance involontaire La hiérarchie et le comportement de garde L’imitation QUELQUES OUTILS Faire connaissance Se faire entendre du chien Ne pas s’énerver Capter son attention Lui donner des ordres efficaces La garde Empêcher les aboiements de garde Accuser silencieusement réception du message Assurer la protection du groupe Remercier le chien Monter la garde à la place de son chien Accueillir les visiteurs Que pourrait faire le facteur ? IDÉES REÇUES Chapitre 10 - Chronique d’une séparation quotidienne La journée de Mme Ellemenveut La journée de la chienne Soli Le point de vue de la famille, des amis, des voisins… PRENONS DU RECUL Début de journée : tendresse et anticipation Le départ : chacune de son côté Une longue journée… Le retour : l’attribution de cause ou d’intention Des répercussions au quotidien QUELQUES OUTILS L’installation des rituels Les rituels de départ Les rituels de retour Disponibilité et initiative des contacts Le chien qui suit son maître Les troubles liés à la séparation IDÉES REÇUES Chapitre 11 - Qu’il est dur de voir son chien vieillir ! Le point de vue de M. et Mme MonVieux Le point de vue de Mat(husalem) PRENONS DU RECUL Une perte de motivation Des difficultés à rester propre Souffrir en silence L’agressivité due à la douleur Le vieillissement des organes des sens La cohabitation avec un chien plus jeune L’hyperattachement Des nuits difficiles L’euthanasie QUELQUES OUTILS Accepter le vieillissement Maintenir le contact Conserver des activités Gérer la santé Gérer la douleur Communiquer avec un chien aveugle ou sourd La démence sénile et les conduites infantiles L’euthanasie : existe-t-il une « bonne » décision ? IDÉES REÇUES Chapitre 12 - Un nouveau chien... Ce n’est pas toujours simple ! Le point de vue de la Famille Grandcœur Le point de vue de Filou PRENONS DU RECUL Le choix de l’adoption Les premiers jours à la maison Le risque de la pitié excessive Autre groupe, autres mœurs Les fugues Le risque de l’idéalisation QUELQUES OUTILS Choisir son chien L’attachement est sécurisant Savoir prendre son temps… et agir tout de suite Comment empêcher les fugues ? IDÉES REÇUES Épilogue Prologue Voici douze histoires qui ont pour héros des chiens et leurs maîtres. Dans ces récits, qui mêlent réalité fictive et fiction réelle, ces animaux agissent, ressentent, pensent et… parlent. Pourquoi leur donner la parole ? Parce que le chien est un personnage de la maison. Il ne nous contredit pas, ce qui est souvent commode… En lui offrant le langage, nous vous permettrons de comprendre comment « fonctionne » votre chien, d’entrer dans son univers, d’imaginer ses représentations, bref, de vous rapprocher de lui un peu plus, donc de mieux communiquer avec lui. Nos récits sont tous construits sur le même modèle. À partir de séquences issues de la vie quotidienne, chacun des protagonistes expose son point de vue. Les faits sont ensuite mis en perspective pour apporter des informations de nature à expliquer le cours des événements, et éventuellement à le modifier. L’analyse des échanges entre les chiens et leurs maîtres nous amènera enfin à vous proposer des outils pratiques, adaptables à de nombreuses situations. Les aventures de nos héros permettent d’aborder les relations avec le chien de manière sensible. Attentifs aux réponses de l’animal, nous essayons de déchiffrer les différentes manières qu’ils ont de s’exprimer, tout en prenant aussi en compte les motivations et les attitudes particulières de chaque maître. Toutes les façons de faire sont acceptables, pourvu qu’elles respectent l’animal dans son intégrité physique et émotionnelle. Il y a toujours plusieurs moyens d’atteindre un objectif, et d’autant plus de chances d’y parvenir que le choix existe : nous tentons de vous apporter ce choix. Vous ne trouverez pas dans ce livre de solutions toutes faites aux problèmes complexes, ni médecine, ni symptômes de maladies, ni traitements… En revanche, nous vous y proposons des descriptions, des explications, des techniques, de quoi vous constituer une boîte à outils « de démarrage », pour construire et optimiser les relations avec votre chien. Mis en œuvre d’une manière harmonieuse, ces outils entrent dans des stratégies de prévention ou de correction des troubles du comportement. À vous maintenant de vous lancer dans cette aventure de communication ! Nous vous souhaitons d’en tirer beaucoup de profit dans votre vie avec votre chien, pour son bien-être et pour le vôtre… Remerciements Nous remercions ici toutes les personnes qui nous ont raconté des épisodes de leur vie avec leur chien, qui nous ont fait partager leurs émotions, leurs réflexions. Nous sommes toujours touchés et honorés de cette confiance. Nous espérons avoir su nous en montrer dignes en utilisant ces « tranches de vie » dans nos récits. Nous avons beaucoup de respect pour les propriétaires de chiens, et particulièrement pour ceux qui sont en difficulté. Nous espérons vous faire sourire à la lecture de nos histoires, même et surtout si vous vous y retrouvez. Convaincus que l’on apprend mieux en s’amusant, nous pensons que ce qui est drôle n’est pas moqueur. Aucune ironie, aucun travers n’est montré du doigt ; si nous prétendons comprendre et accepter les chiens avec leurs différences, comment pourrions-nous ne pas aspirer à la même chose avec leurs maîtres ? Nous nous sommes nourris de nombreuses questions et remarques de nos conjoints, amis et confrères, et nous voudrions citer plus particulièrement : Evelyne Massal ; Gérard Beaumont ; Dominique Lachapèle-Brard ; Marielle de Bechillon ; Raimondo Colangeli ; Frédérique Vincent de Madjouguinsky. Leurs encouragements et leurs remarques amicales, constructives et pertinentes nous ont aidés à finaliser cet ouvrage. Nous les en remercions ici chaleureusement (et pour certains, tendrement). Qui sommes-nous ? Vétérinaires comportementalistes, nous sommes avant tout des praticiens dont le métier est de soigner les animaux. Nous nous sommes spécialisés dans les troubles du comportement. Passionnés par la relation entre les maîtres et leurs animaux, nous sommes tous les jours les spectateurs de grandes réussites, et parfois les témoins de blocages ou d’échecs. Grâce à l’étude des troubles des émotions, des difficultés adaptatives, des maladies psychiques, nous avons affiné notre connaissance de la relation entre l’homme et l’animal. Nous avons constaté qu’un grand nombre de difficultés relevaient du champ de la communication, et que l’amélioration de cette communication était une condition nécessaire sinon suffisante à la guérison. Nous vous proposons ci-dessous un petit guide vous permettant de trouver facilement dans l’ouvrage la réponse à une question que vous vous posez. Où trouver les réponses à vos questions ? Chapitre 1 - Premier apprentissage, première difficulté de communication... Voici une tranche de vie que tout propriétaire de chiot a connue : l’apprentissage de la propreté. Chacun tente d’appliquer « la » recette infaillible, et même d’en mélanger plusieurs pour être encore plus efficace. Les conseilleurs ont - disent-ils - toujours eu de bons résultats. Cependant, quoi qu’il arrive, les chiots ne contrôlent correctement leur sphincter, ce petit muscle qui ouvre et ferme la vessie, qu’à partir de trois ou quatre mois. Une période délicate, et presque obligatoire, est donc à prévoir. Quelle que soit la recette proposée (correction en flagrant délit, explication « bien sentie », traque sans relâche du chiot et de ses méfaits), les conseilleurs ont oublié de dire que leur méthode « magique » avait demandé… un à deux mois pour porter ses fruits ! Le point de vue de Mme Nefaispaslà L’arrivée du chiot est une fête pour toute la famille. Bien sûr, il va sûrement faire des bêtises, car c’est un bébé, et évidemment, c’est la maîtresse de maison qui va assumer à la fois le nettoyage des dégâts et l’éducation du jeune animal. Désireuse de bien faire, elle intervient dès le premier pipi découvert. Jep est attrapé et conduit sur le lieu du délit ; Mme Nefaispaslà lui met le museau dedans (pour qu’il comprenne) et le réprimande de la voix et du geste, évidemment sans violence, par une tape sur les fesses. Le chiot tout penaud s’éloigne tête basse : « Il a compris qu’il a mal fait. » L’urine est nettoyée promptement, avec un désinfectant (ammoniaqué) naturellement. Pourtant, le lendemain, Jep urine à nouveau au même endroit. Son forfait accompli, il s’éloigne. Lorsqu’il franchit la porte, sa maîtresse surgit, constate les faits, et soulève aussitôt Jep afin de renouveler un peu plus sévèrement l’explication mal comprise de la veille. Maintenant, il y a récidive ! Malgré cela, un peu plus tard, Jep arrose à nouveau le lieu du crime, cette fois-ci sous les yeux de sa maîtresse… Mme Nefaispaslà se dit qu’elle a été trop laxiste : la punition est immédiate et sévère. Après la cérémonie du « nez-dedans » et de la fessée, Jep est mis à l’écart et ignoré pendant une bonne heure : « Comme ça, il comprendra ! » Cependant, le lendemain, c’est un autre coin de la pièce qui est souillé, toujours sous les yeux de la maîtresse de maison, de plus en plus excédée… et désemparée ! La punition rituelle est appliquée, mais un doute sur la technique employée amène la famille à discuter de son bien-fondé (elle est pourtant efficace avec tous les autres chiens, paraît-il). Tout le monde donne son avis, les méthodes douces et violentes sont comparées, évaluées. Des hypothèses sont avancées pour expliquer l’attitude étrange de Jep. Les chiens précédents n’ont pas posé tous ces problèmes (la mémoire est bien sélective…). Décision est prise de sortir plus souvent le jeune chien : durant ces sorties, il est chaleureusement encouragé à vider sa vessie. Alors il joue, il tourne, il vire, il court, il bondit, il fait des allers-retours, mais il n’élimine pas. Pas dehors en tout cas, car il urine… dès son retour dans la maison ! « Le ferait-il exprès pour nous embêter ? » Le point de vue de Jep (’pas pu me retenir) Jep arrive dans son nouveau foyer. « Que c’est grand ! » Bien plus grand que son ancienne maison… « Voyons, comment organiser les choses ? Alors ici on mange, là on se repose, et là on joue. » Le reste est vaste et permettra de faire ses besoins facilement. Tandis qu’il rejoint son lieu de couchage, il est pris d’une brusque envie d’uriner (en fait, il n’a que des envies brusques…) : « Peut-on faire là ? Pourquoi pas ? » Et hop, pipi sur le carrelage. Jep s’endort ensuite dans son panier. Soudain, sa nouvelle maîtresse surgit, le soulève sans ménagement et l’entraîne un peu plus loin. Elle paraît énervée, lui montre une flaque de liquide et le frotte dedans : « Tiens, c’est mon urine, mais qu’est-ce qui lui prend ? » Puis c’est la fin de l’incident, le calme revient : « Que s’est-il passé ? » Plus tard, sur le même lieu de passage, une nouvelle envie d’uriner le surprend : « Ça sent bon par ici, allons-y ! » Jep se soulage. Cependant, alors qu’il s’éloigne et franchit la porte, sa maîtresse se met à crier, le saisit et recommence la cérémonie du passage dans le pipi… « Drôles de mœurs ici, ils ont l’air d’aimer se rouler dedans… Je l’ai mise en colère en passant cette porte, je vais devoir faire attention ! » Tout le reste de la journée, Jep franchit la porte en se baissant et en jetant des regards inquiets autour de lui, mais rien ne se produit (« c’était sans doute une crise passagère des humains… »). Le lendemain, lorsqu’il s’apprête à utiliser à nouveau son site d’élimination, catastrophe, voilà que ça reprend sa maîtresse ! Et vlan, le museau est passé à l’urine et les fesses claquées ; Jep est ensuite mis à l’écart sans ménagement. « C’est bizarre… Décidément, il va falloir se méfier ici à l’avenir ! » Lorsque l’envie survient à nouveau au même endroit, Jep a bien retenu la leçon : « Ma maîtresse a l’air de tenir à ce carreau-là, je vais aller un peu plus loin. Ça lui fera plaisir, elle verra que j’ai compris. » Il s’éloigne du lieu si apprécié de sa maîtresse et urine deux mètres plus loin… sur un autre carreau ! Néanmoins, les foudres se déchaînent une fois de plus sur le pauvre chiot. Décidément, quoi qu’il fasse, les humains semblent connaître des moments d’énervement ! De plus, rien n’est logique : « Ils n’aiment pas le pipi et pourtant ils me trempent dedans ! Ils n’arrivent pas à décider quel carreau ils préfèrent, s’ils désirent plutôt un pipi chaud ou un pipi froid, si je dois ou non passer la porte… » Par la suite, Jep est emmené dehors, où sa maîtresse semble attendre quelque chose. Il a bien envie d’uriner, mais cette action a déclenché de telles colères les fois précédentes qu’il est bien décidé à se retenir : « Surtout ne pas faire devant elle, ça la mettrait en colère ! » Pour essayer de satisfaire les attentes évidentes de sa nouvelle maman, Jep l’invite à jouer, fait le fou et court autour d’elle. La promenade se termine, tout le monde rentre à la maison, et enfin sa maîtresse s’éloigne. « Ouf, il était temps ! » Jep vide sa vessie sur le carrelage loin de sa vue… PRENONS DU RECUL Cette situation est très représentative de la communication entre l’homme et le chien, ou plutôt des difficultés auxquelles elle les expose. Les développements qui vont suivre font apparaître des 5 éléments très utiles à la structuration des relations entre espèces (et aussi entre individus…). La relation est une construction complexe, comportant tellement de variables et de paramètres que même un enchaînement de contresens ne conduit pas systématiquement à l’échec ! On peut ainsi parvenir à des situations parfaitement fonctionnelles, sans qu’aucune compréhension réelle n’existe entre les protagonistes. Le saviez-vous ? À chaque âge du développement correspondent des capacités d’apprentissage différentes. Que ce soit chez les chiots ou chez les enfants, les différents stades d’acquisition de ces capacités sont bien codifiés. Alors que la complexité du développement humain demande plusieurs années, ce délai est réduit à quelques semaines chez le chien. Par conséquent, nous avons plus de difficultés à évaluer à quel stade en est l’animal. A-t-il à tel moment la capacité de bien comprendre ce qu’on lui demande, ou faut-il attendre la semaine suivante ? Ce concept, évident « à froid », est plus délicat à accepter lorsque le maître doit réparer des dégâts… Lorsque le chiot succède à un autre chien qui maîtrisait bien son cadre de vie, le contraste est d’autant plus générateur de frustration pour le maître. Il faut alors faire un effort de mémoire pour se souvenir du chien précédent, qui lui aussi est passé par une période d’apprentissage avant de devenir un compagnon modèle. Le développement progressif du chiot Le chiot arrive dans un domaine vaste et inconnu. Dans le meilleur des cas, sa mère lui a appris à respecter les endroits où l’on mange, où l’on dort et où l’on joue : ni urine, ni selles. Comment le lui a-t-elle enseigné ? Par l’exemple, tout simplement : le chiot suit sa mère et l’imite. Le saviez-vous ? Spontanément, le chiot a tendance à ne pas éliminer dans les zones où il se repose. Toutefois, s’il reste enfermé dans un enclos, il se résigne rapidement à faire là où il se trouve et… finit par en prendre l’habitude. C’est souvent le cas des chiens provenant d’élevages intensifs, grandissant sans leur mère et parfois sur des caillebotis (les déjections s’écoulent alors sous les animaux). Issus de ces élevages dans lesquels ils ne disposent pas d’endroits distincts pour dormir, se coucher et éliminer, ces chiots apprennent plus difficilement la propreté. Dans sa nouvelle maison, loin de ses zones de repos habituelles, il reste beaucoup de place à Jep pour éliminer : l’éventail des possibilités est large… Le chiot ne fait d’ailleurs pas très bien la différence entre l’extérieur et l’intérieur, la terrasse et le jardin. La notion de propreté du chiot n’est pas la même que celle de ses maîtres, et il faudra quelques semaines pour qu’il organise son territoire. Il doit aussi être capable de se contrôler physiquement. En effet nous l’avons vu, et c’est un point essentiel de l’apprentissage de la propreté, le contrôle du sphincter de la vessie (le muscle qui empêche l’urine de s’écouler) n’est fiable et constant qu’au-delà de trois ou quatre mois. La patience est donc de rigueur… Le chien va peu à peu se livrer à des activités variées de jeu ou de repos dans la totalité du logement, créant ainsi autant d’endroits dans lesquels il ne souhaitera pas éliminer. De plus, il parviendra à se retenir en grandissant, et aura appris à demander des choses à ses maîtres, par exemple sortir pour faire pipi ! Que comprend-il ? Dans sa tentative de compréhension canine des réactions humaines, le chiot associe les événements entre eux, ce qui lui permet à sa manière d’identifier des liens de causalité. Ici, c’est en passant la porte qu’il a mis sa maîtresse en colère… Le chien n’intègre dans sa perception du contexte que les éléments du moment présent, il ne peut donc pas associer une punition à un acte passé, même si celui-ci a eu lieu quelques minutes auparavant. Il a cependant de la mémoire, et son expérience lui permet d’anticiper une situation ou une réaction de ses maîtres, à condition que celle-ci se répète dans des circonstances identiques. Ces réflexions nous amènent à un point essentiel : si une action doit être réprimandée, elle doit l’être dans l’instant, dès la première fois, et toujours de la même façon. Nos réactions doivent donc être aussi constantes que possible, afin d’être prévisibles. En période d’apprentissage, c’est la répétition du même acte associé à une réponse identique qui va conduire le chien à mémoriser la situation et à en tirer des enseignements. Cette répétition est en quelque sorte une tentative de « vérification » par le chien. Si la réponse des maîtres à la récidive se modifie, ce qui est le cas lorsqu’ils considèrent que leur animal les provoque ou les défie (« la première leçon aurait dû suffire »), le test échoue. Les maîtres doivent veiller à fournir des réponses identiques, donc structurantes, aux vérifications du chien. Prenons le cas d’un chien qui s’approche de la poubelle et commence à en soulever le couvercle. Son maître intervient promptement, affirme avec colère sa réprobation et le chasse. Le chien revient quelques instants après pour « vérifier ». Si la réaction de son maître n’est pas la même, sa vérification échoue. Notons que la réaction du maître a toutes les chances d’être différente : soit il n’intervient plus, lassé de répéter les mêmes réprimandes ; soit il ressent l’attitude du chien comme une provocation et sa réaction est alors plus violente, plus rapide, et comporte plus de paroles, comme « je te l’ai pourtant dit » ou « je t’avais prévenu ». Les odeurs d’appel La manière dont le chien perçoit les éléments de son environnement est conditionnée par ses capacités sensorielles. L’eau de javel ou tout autre nettoyant chloré ou ammoniaqué, qui donne à ses utilisateurs une sensation de propre et d’hygiène, est pour le chien un repère qui l’incite à éliminer. Ces produits possèdent de plus la propriété de fixer l’odeur d’urine. Ces odeurs sont importantes pour la structuration de l’espace du chiot, qui est justement en train d’organiser son milieu de vie dans ses nouveaux locaux. Le « marquage » à l’eau de Javel revient presque à planter un drapeau avec la mention « Faire pipi ici ! » Nous voyons ainsi à quel point nos univers sensoriels sont différents : dans la même situation, au même moment, le chien ne reçoit pas les mêmes informations que nous, et il ne leur accorde pas la même importance. Les conséquences inattendues des punitions Il est évident pour Mme Nefaispaslà qu’en passant le museau du chiot dans l’urine, elle va lui faire comprendre qu’il ne doit pas uriner là - ni ailleurs dans la maison -, et qu’il doit demander à sortir si l’envie est pressante ou attendre si personne n’est présent ou disponible pour faire ses besoins dehors… Bien sûr, rien de tout cela n’est raisonnablement possible ! Que comprend le chiot ? Que « maman » est énervée, et que pour se calmer, elle le trempe dans l’urine. Afin d’apaiser cette colère, il tente la technique qu’il maîtrise le mieux : se faire petit, se tenir le plus bas possible, baisser la tête et regarder « par en dessous… » Cette attitude fonctionnait bien avec sa première mère ! Par manque de chance, ces signaux d’apaisement canins ressemblent à s’y méprendre à la posture de l’humain coupable. Le quiproquo est lancé : si le chiot se sent coupable, c’est qu’il a compris qu’il a mal agi, donc s’il récidive, c’est qu’il le fait exprès… En tentant de ne pas irriter sa maîtresse, le chiot choisit un autre lieu d’élimination et urine devant elle, ce qui prouve à quel point il n’a pas l’impression de faire une bêtise ! La seconde punition, donnée suite au flagrant délit, est appliquée correctement : sur le moment, et avec assez de fermeté et de sévérité pour que le chiot sente que son acte a déclenché la réaction… Malheureusement, les signaux d’apaisement qu’il émet sont peu respectés, et surtout, les éléments qu’il retient ne sont pas forcément les bons : ici, il considère qu’il a commis une faute en urinant devant ses maîtres ! Un chien peut être motivé de deux manières en situation d’apprentissage : en obtenant des satisfactions ou en évitant des punitions. Les émotions qui accompagnent ces deux situations sont très différentes et conditionnent la qualité de la relation avec l’éducateur. De plus, savoir ce qu’on ne doit pas faire n’indique pas forcément clairement ce que l’on doit faire. L’exemple de l’erreur que fait le chiot concernant le lieu d’élimination est éloquent : dans un premier temps, il respecte le lieu indiqué lors de la punition, mais pas tous ceux qu’on ne lui a pas encore signalés ; dans un deuxième temps, il finit par conclure que ses maîtres ne veulent pas le voir uriner… Le saviez-vous ? Sur quelles bases psychologiques et sociologiques humaines l’idée que l’apprentissage suppose rigueur et punition reposet-elle ? Ce n’est pas à nous de le déterminer, mais il est certain que ce n’est ni sur la rapidité ni sur la facilité d’acquisition de celui qui apprend ! Imaginez-vous dans la situation suivante : vous êtes au milieu d’une pièce, votre éducateur souhaite que vous vous dirigiez vers la porte. Il vous le demande, mais il ne parle pas votre langue. Au premier pas dans une autre direction, il vous dit gentiment que vous avez tort. Sentant qu’il vous réprimande, vous revenez à votre place, l’éducateur pense que vous avez compris. À la deuxième erreur, il le dit à nouveau, de manière plus forte, plus menaçante. Progressivement, il s’énerve, et éventuellement vous bouscule, créant une atmosphère pesante. Vous n’osez plus bouger et n’attendez plus qu’une chose : qu’il s’en aille ! Si à l’inverse l’éducateur ignore vos erreurs et vos tâtonnements et tente de trouver des moyens de vous encourager à aller dans la bonne direction, vous êtes motivé pour apprendre et rechercher la satisfaction de l’exercice réussi, que vous partagerez avec lui. Une pluie de conseils La maîtresse doute. Elle est alors en position de faiblesse, vulnérable, et va attirer de manière spectaculaire tous ceux qui sont prêts à l’aider. Sans qu’elle ait besoin de demander quoi que ce soit, les conseils et les explications arrivent en abondance. Tous reposent sur des expériences personnelles ou de proches, et leur valeur universelle ne fait aucun doute. L’imagination des éducateurs est sans limite : supports pour uriner (journal, serpillière…), lieux, horaires, techniques répressives, restrictions en eau ou en nourriture, hypothèses folkloriques sur la hiérarchie (un chiot de deux mois n’est qu’un bébé !), tares génétiques, incompétence des maîtres… Distrayantes ou irritantes, et parfois franchement culpabilisantes, ces suggestions viennent rarement combler les attentes du maître en difficulté. Une constante s’observe cependant : chaque fois que le conseil est simple, ou simpliste, il s’agit d’une caricature inutilisable. L’animal est complexe, vous êtes complexe, et votre relation est unique. Le saviez-vous ? Nous pouvons relever l’analogie avec l’apprentissage de la propreté chez les enfants. Tant que leur contrôle neurologique n’est pas opérationnel, nous leur mettons des couches, ce qui évite bien des désagréments. Puis nous les initions au pot, et à partir de ce moment, la situation peut être comparée à celle qui nous préoccupe : il y a autant de techniques que d’éducateurs et autant de conseillers que de personnes dans l’entourage ! Les résultats sont par ailleurs excellents : tous les enfants finissent par utiliser les toilettes ! Toute ironie mise à part, qu’est-ce que cela veut dire ? Que les gens aiment avoir raison et triompher des difficultés, c’est humain. Cela signifie surtout qu’il existe plusieurs techniques conduisant au même résultat, et que la meilleure est… la vôtre ! QUELQUES OUTILS Concrètement, que pourrait faire Mme Nefaispaslà ? En répondant à cette question, nous prenons le risque de tomber dans le travers des conseilleurs dont nous nous sommes moqués un instant plus tôt… Comment éviter cet écueil ? Peut-être en compliquant légèrement l’objectif : au-delà de l’acquisition de la propreté, c’est tout le modèle des relations entre le jeune chien et ses maîtres qui est présent dans cet apprentissage. Le chien est confronté aux premiers interdits, aux premières règles édictées ; les maîtres ont des informations à délivrer, des indications à donner, des structures à mettre en place. L’apprentissage peut être un véritable pensum, ou au contraire une aventure de découverte réciproque passionnante. Quel qu’il soit, il nécessite : de bien définir ses objectifs ; de planifier une stratégie ; de maîtriser l’art de la punition et de la récompense ; de savoir donner les ordres appropriés. Se fixer des objectifs Il est nécessaire de planifier vos actions et de préparer les réponses que vous allez utiliser pour guider votre chien. Avant de lui demander quelque chose, prenez quelques instants pour définir vos objectifs et envisager la manière dont le chien va pouvoir répondre à votre attente : Quelles seront éventuellement les étapes nécessaires ? Comment encourager votre chien s’il y parvient ? Quelles erreurs risque-t-il de faire ? Comment les éviter ? À partir de quel stade considérerez-vous que l’exécution est correcte ? Comment le ferez-vous savoir à votre chien ? Heureusement, vous ne devez pas toujours procéder ainsi, mais il est profitable de vous livrer à cet exercice dès que vous échouez dans un apprentissage. Pour ce qui est de la propreté, l’objectif est clairement défini : le chiot doit éliminer dehors, lors de sorties rythmées par vos horaires de travail. Il vous reste à réfléchir au délai nécessaire pour obtenir ce résultat et aux étapes intermédiaires. Apprendre la propreté à son chien Une stratégie familiale commune (tous les membres de la famille se comportent de manière identique) est une excellente initiative : le chien apprend plus facilement un code unique, et des réponses prévisibles et constantes vont l’aider à structurer son univers et donc ses attitudes. La stratégie que nous estimons la plus à même de « fournir » rapidement un chiot propre, qui conserve de bonnes relations avec son maître, consiste à : être patient tant que le chien ne se contrôle pas bien (jusqu’à trois ou quatre mois), il est parfois lui-même surpris par l’urgence de ses besoins ; observer et détecter les signes qui indiquent l’imminence d’une élimination, sachant que cela se produit préférentiellement quand le chien vient de manger, de dormir ou de jouer ; l’emmener alors dans les lieux appropriés pour éliminer, repérer l’endroit de prédilection du chien (il s’agit souvent d’un lieu dans lequel il n’est pas dérangé ou importuné par des bruits ou du passage) et y revenir ; ne pas le distraire (il préfère toujours jouer, et attendre pour éliminer) ; le récompenser aussi systématiquement que possible lorsqu’il a fini d’éliminer au bon endroit ; ne pas revenir aussitôt à l’intérieur s’il désire jouer encore un peu. Si vous rentrez aussitôt, alors qu’il exprime une grande joie à être dehors, vous le sanctionnez d’une certaine façon et il risque de retarder son élimination ; ne pas le laisser seul : votre présence le rassure, et il doit être détendu pour éliminer ; ignorer les déjections découvertes après coup, même si elles sont récentes ; ne pas les nettoyer en sa présence, et ne pas utiliser de produit à base d’eau de Javel ou d’ammoniaque ; l’interrompre si on le prend sur le fait et le conduire promptement sur le lieu destiné à cet usage ; s’il élimine, bravo ! Sinon, ne faire aucun commentaire. Le saviez-vous ? Associer l’acte d’éliminer à l’ordre d’éliminer (« Pipi ! ») permet en prime d’apprendre au chien à faire ses besoins sur ordre. Cet apprentissage se révèle utile quand les journées du maître sont minutées ou lors d’un voyage avec son chien. En agissant de cette manière, vous favoriserez les progrès du chiot aussi rapidement qu’avec une autre méthode. Vous préserverez aussi sa confiance et économiserez énergie et adrénaline en évitant les malentendus. Nous ne sommes pas des adeptes du journal, de la serpillière, ou de tout autre dispositif indiquant au chiot qu’il doit éliminer dedans. Cette technique comporte plusieurs inconvénients. Elle conduit avant tout à un double apprentissage : vous apprenez d’abord au chiot à faire dedans, puis vous devrez lui apprendre… à ne plus faire dedans ! Pour le chiot, cette attitude manque de clarté. Tant qu’il ne sait pas lire, il n’identifiera pas si facilement le journal du jour qui, lui, doit être respecté. Enfin, et c’est souvent le plus irritant, le chiot peut mémoriser le lieu où le support est placé, ce qui le conduit à continuer au même endroit (marqué par l’odeur attractive de son urine), même après que l’on a retiré le support initial destiné à l’élimination. Nous partons du principe que si le chiot peut apprendre à se retenir et à éliminer dans un lieu désigné, alors il peut apprendre à demander à aller dehors. Il est donc plus simple de lui enseigner directement ce qu’il devra appliquer ensuite. Une exception est à noter : certains chiens de petite taille utilisent durablement des litières pour chat, d’autres se rendent sur le balcon - mais un balcon n’est plus tout à fait à l’intérieur… L’art de la punition Pourquoi punir ? Si malgré toutes nos justifications, vous souhaitez avoir recours à la punition - ou, plus vraisemblablement, si vous perdez votre sang-froid ou si vous avez à faire face à une « provocation » -, il vous faut apprendre à punir. La punition est un procédé éducatif qui peut être utile. Elle est utilisée dans le but de faire cesser un comportement indésirable. Les chiens y ont aussi recours entre eux, pour faire respecter des règles de vie en communauté. Pour être efficace, la punition doit 15 s’adapter à la communication canine. Il en résulte que toutes les explications verbales sont sans objet. En effet, nous avons vu que le chien ne retient d’une situation que le contexte et les éléments qu’il peut en percevoir, et vos explications n’en font pas partie. Lorsque vous désirez punir votre chien, veillez à ce qu’il comprenne bien ce qu’il doit corriger : faites-le immédiatement, si possible dès que vous le voyez amorcer le comportement répréhensible ; agissez toujours de la même façon, et chaque fois qu’il le fait. Ainsi, vous créez un contexte répétitif : les éléments constants sont susceptibles d’être retenus par le chien. Vous pouvez mesurer le succès de votre intervention par le fait de ne plus avoir à l’effectuer. Si vous vous trouvez en situation de punir plusieurs fois dans les mêmes circonstances, interrogez-vous : soit le chien ne comprend pas ce que vous cherchez à lui interdire, soit il n’interprète pas votre intervention comme une punition, mais plutôt comme un jeu ou comme un message qui ne lui est pas destiné. Modifiez votre méthode plutôt que de suspecter votre chien de chercher à vous embêter… En fait, une punition est assez compliquée à réussir. Pour y parvenir, une grande constance est nécessaire, et vous devez avoir la certitude que le message perçu par le chien correspond bien à l’objectif visé. Le saviez-vous ? Lorsqu’une mère chien sanctionne ses petits, elle le fait d’emblée avec une intensité maximale, ce qui surprend bien souvent les observateurs (qui la suspectent d’en faire trop). Les chiens adultes sont toujours très sévères avec les chiots, dès la première infraction à une règle. Par exemple, lorsque de jeunes chiots s’approchent de la gamelle des adultes, les grognements dents découvertes sont impressionnants ; ils ne cessent que lorsque les petits battent en retraite ou s’immobilisent au sol. Quel est l’avantage de cette technique ? Il n’est pas nécessaire d’y avoir à nouveau recours : une fois suffit, ce qui est le critère que nous avons retenu pour estimer qu’une punition est efficace. Par la suite, la menace de punition suffit à interrompre le comportement fautif. Le code se simplifie et devient économique - dans notre exemple, la chienne se contente ensuite de relever légèrement les babines. Que punir ? Il n’est pas facile de répondre à cette question. La sanction survient lorsque le chien fait une erreur, afin que celle-ci ne se renouvelle pas, mais encore faut-il qu’il ait identifié sa faute… Nous avons dit précédemment qu’il était préférable de guider le chiot en douceur dans ses apprentissages, mais il existe des exceptions : l’apprentissage des règles sociales structurant la vie du groupe (les repas, le contrôle des morsures, le respect des adultes et de leurs biens) et les situations dangereuses. Si votre chiot s’échappe dans la rue, vous devez marquer sévèrement son erreur afin qu’il la mémorise rapidement et ne recommence pas à se mettre en péril. Vous interdirez de la même façon le vol ou l’ingestion d’objets non alimentaires… Comment punir ? La punition physique n’est pas pertinente, car elle est assimilée à une agression par le chien. Le recours à cette technique a deux conséquences possibles : soit le chien finit par avoir peur de son maître ; soit il se retourne contre lui lorsqu’il a atteint un « format » suffisant, ou lorsqu’il n’accepte pas la punition. Punir un chien physiquement n’est envisageable que pour répondre à une agression de sa part. Proscrivez la prise par le cou, très agressive pour l’animal après l’âge de trois mois. Sur certains petits chiens, cette prise est systématisée par les maîtres et devient dans ce cas un code connu entre eux, mais ce n’est pas un code « canin ». Si vous devez stopper le chien, appliquez plutôt une pression douce et ferme au garrot, il comprendra tout aussi bien et ne sera pas stressé. Il ne s’agit pas de répression mais de contrôle physique, ce qui est bien différent. Sachez arrêter votre punition lorsque le chien prend une position basse, car il vous dit à sa manière qu’il vous respecte. Si vous insistez, il aura peur, mais ne comprendra pas mieux… C’est pourquoi, comme nous vous y inviterons à plusieurs reprises dans cet ouvrage, vous devez respecter les signaux d’apaisement émis par votre chien. Ces signaux, unique réponse qu’un chien peut fournir dans les situations « d’autorité », sont tout ce que vous pouvez espérer obtenir lorsque vous le réprimandez ! Guettez cette réponse, et arrêtez votre punition lorsque vous la percevez. Ce dialogue est la base de votre relation de confiance. La punition la mieux comprise est celle que les chiens utilisent eux-mêmes : ils chassent l’auteur du délit loin du groupe. Faites de même : après avoir réprimandé sur un ton clairement autoritaire votre chien (« Non, assez ! »), exigez fermement qu’il s’éloigne (« Va dans ton panier ! »), en cessant toute menace dès le début de l’obéissance. N’oubliez pas de le féliciter lorsqu’il rejoint son panier : « Bravo, c’est bien… » Le chien comprend alors que son maître change d’attitude dès qu’il effectue un comportement désiré. Il peut en déduire que c’est un comportement précis qui a provoqué la colère du maître et non lui-même, puisque son changement de conduite a modifié la réaction de son maître. Le maître ne punit plus, il oriente les comportements du chien, et devient ainsi apaisant. Vous pouvez graduer votre punition par l’intensité des signaux de colère et de menace que vous utilisez ; n’hésitez pas à forcer le trait, il s’agit bien de théâtre, de codes de communication. Si vous avancez sur le chien en levant les bras et en parlant très fort, il y a des chances pour qu’il détale plus rapidement que si vous le chassez sans bouger. Ainsi, il peut évaluer le degré de votre mécontentement. Il est parfois utile de se mettre à plusieurs, en coalition face au chien (cf. Mme Débordée dans le chapitre 5). L’exclusion ne doit pas durer plus de quelques minutes, sinon la « leçon » perd son sens… En effet, pour le chien, la « conversation » est terminée à partir du moment où il a fourni une réponse appropriée, et le fait de s’éloigner est pour lui un signal d’apaisement pertinent. Montrez au chien que vous validez ce signal en cessant votre message d’autorité : pas de poursuite, pas de cris prolongés, pas de menaces alors qu’il est dans son refuge (son panier, ou tout espace en général couvert, dessous de table ou d’escalier…). Il peut chercher à se réfugier dans un coin. Si vous l’acculez en continuant à le réprimander, il peut même en venir à vous menacer tant il a peur, incapable de comprendre votre insistance. Le saviez-vous ? Le chien a besoin d’un endroit bien à lui, d’un lieu dans lequel il peut dormir ou se reposer en sachant qu’il n’y sera jamais dérangé. Vous pouvez le matérialiser en y plaçant un panier ou une couverture. C’est une zone que vous devez impérativement respecter. Si vous souhaitez par exemple le caresser alors qu’il s’y trouve, demandez-lui d’abord gentiment d’en sortir. Nous verrons avec la famille FairePart dans le chapitre 3 qu’il faut apprendre aux jeunes enfants à respecter ce lieu, pour que le chien puisse se relaxer en toute quiétude. En cas de punition, il s’y réfugie spontanément, ce qui lui permet d’exprimer un signal d’apaisement, de se retirer de l’interaction. À l’abri de la colère, il peut alors se détendre. Enfin, pour être un bon maître respecté et non craint, sachez ensuite rappeler votre chien et lui donner une brève caresse dès son retour : vos relations seront ainsi placées sous le signe de la confiance. De plus, cela évite que le chien revienne de lui-même un peu plus tard, sans savoir avec certitude s’il y est autorisé ou pas. Le saviez-vous ? Après une punition, le rappel suivi d’une caresse crée un contexte apaisant, une émotion positive, susceptible de stimuler le désir d’apprendre. On apprend mieux si on se sent bien. Dans le cas contraire, le chien risque surtout de retenir que « ça s’est mal passé ». Il évitera alors les situations comparables, et redoutera parfois les réactions de son maître, sans être réellement capable de se les expliquer ni de les anticiper, ni même de supposer qu’il en est la cause ! La punition est un ensemble, chaque élément est important : demande d’éloignement ; arrêt des menaces ; rappel. Si vous vous montrez sûr de vous, magnanime, et si vous contrôlez la situation, aussi bien pour éloigner votre chien que pour le faire revenir à votre contact, vous êtes un bon protecteur, vous assurez votre rôle. L’efficacité des récompenses Avec des récompenses et des encouragements, les résultats du chien seront plus rapides et plus satisfaisants, quel que soit le type d’apprentissage considéré. Vous pouvez guider votre chien en l’encourageant lorsqu’il commence, en le récompensant au fur et à mesure des différentes étapes du comportement, et en cessant de le récompenser lorsqu’il se trompe (un peu comme les enfants qui jouent à chercher un objet : ils disent « tu brûles » lorsque l’un d’eux s’approche du « trésor », « tu refroidis » lorsqu’il s’éloigne…). Créez des situations éducatives, orientez les actions du chien. Ainsi, en le sortant aux moments où il y a une grande probabilité qu’il veuille éliminer (après avoir dormi, mangé ou joué), vous augmentez ses chances de se faire féliciter. En l’amenant systématiquement là où il doit faire ses besoins, vous créez de plus une habitude. Bien sûr la récompense peut être mal comprise, au même titre que la punition. Cependant, alors que le chien va éviter tout ce qu’il associe à la punition, il cherchera au contraire à se faire à nouveau féliciter, car il apprécie ces instants de plaisir. Une récompense mal interprétée entraînera des essais de la part du chien pour reproduire ce qui avait été si agréable, et vous pourrez alors l’orienter différemment, avec des encouragements, des invitations… Vous ne ferez donc jamais d’erreur en le récompensant. Le saviez-vous ? La méthode de façonnement du comportement du chien (que les Anglo-Saxons appellent le shaping) est tout à fait indiquée pour l’apprentissage de la propreté, car elle permet d’amener progressivement le chiot à éliminer là où on le souhaite, et au moment où on le lui propose. Éviter les ordres négatifs Dans la situation qui nous intéresse, nous opposons les ordres « Ne fais pas dedans ! » à « Fais dehors ! » Le premier est un ordre négatif. Il est plus que probable que le cerveau du chien ne lui permette tout simplement pas de comprendre ce type d’ordre. De plus, il y a tellement de façons de ne pas faire quelque chose ! Comment effectuer un tri et sélectionner l’attitude convenable ? Plus généralement, il est cohérent de demander l’exécution d’une action ou l’arrêt d’une action en cours, mais il est difficile de suggérer qu’une action n’ait pas lieu sans avoir recours au langage verbal. Si l’on félicite le chien pour ne pas avoir fait quelque chose, pour un acte qu’il n’a pas commis, il va associer la récompense à un élément du contexte réellement présent, en développant parfois une sorte de superstition. Par exemple, si un matin où le chiot n’a pas uriné, vous lui dites « C’est bien, tu n’as pas uriné ! » en le caressant, il va retenir que lorsque vous portez votre pyjama rose, vous êtes de bonne humeur. Il sera alors très heureux la prochaine fois que vous le mettrez… Vous devez donc vous astreindre à formuler positivement vos ordres, ce qui n’est pas bien difficile avec seulement un peu d’attention. À vous de jouer ! IDÉES REÇUES « Certaines races de chiens sont propres plus rapidement que d’autres. » Non, en revanche, de mauvaises conditions d’élevage peuvent faire la différence, et elles diffèrent selon les races. « Il faut lui mettre le nez dedans pour qu’il comprenne. » Son urine ne lui inspire aucun dégoût et il n’associe pas l’action et son résultat : voilà deux bonnes raisons de ne pas avoir recours à ce procédé. « Si le chien n’est pas propre, c’est la faute des maîtres. » C’est loin d’être le cas. Les chiens finissent toujours plus ou moins par apprendre. En revanche, les conditions d’élevage, l’âge auquel est commencé l’apprentissage de la propreté, et certains troubles du comportement peuvent conduire à l’échec. Dans ce cas, le recours à un spécialiste est souhaitable. « Les femelles sont plus propres que les mâles. » Elles ne sont pas plus propres, elles sont plus vite propres : sans doute parce que davantage concentrées et moins vite distraites, elles apprennent plus vite, comme les petites filles à l’école… « Il sait qu’il a mal fait. » Les signaux d’apaisement qu’émet le chien face à la colère de ses maîtres peuvent faire penser à tort qu’il s’agit de repentir. Il n’en est rien : le chien perçoit la colère de ses maîtres, mais ne peut l’associer à la faute commise précédemment. RÉCAPITULONS Le contrôle sphinctérien du chien n’est fiable et constant qu’au-delà de trois ou quatre mois. La patience est donc de rigueur face à sa propreté. En situation d’apprentissage, le chien associe son acte présent et les éléments du contexte environnant aux conséquences qui en résultent. Si un chien utilise systématiquement un lieu d’élimination, il finit très souvent par l’adopter plus ou moins définitivement, et il est difficile par la suite de lui en faire changer. Pour être mémorisées et prévisibles, les conséquences de vos actes doivent être identiques : il importe donc de rester constant dans ses réponses. Seules les méthodes d’apprentissage fondées sur la récompense sont à même de préserver la qualité des relations futures et les enseignements ultérieurs. L’utilisation d’ordres négatifs n’est pas pertinente avec un chien. Des ordres positifs sont préférables : on lui demandera « Fais ceci ! » plutôt que « Ne fais pas cela ! » L’usage de la punition fait appel à trois règles élémentaires : punir à chaque fois, sévèrement, et dès le début de l’action. La punition physique n’a pas de sens pour l’animal, car il apprend simplement que vous pouvez être violent, ce qu’il cherchera à éviter. Punir, c’est chasser le chien en exigeant qu’il s’éloigne (pas de poursuites, ni de contacts physiques, ni de grands discours, juste un ordre simple « Va dans ton panier ! »), puis le rappeler quelques instants plus tard. Le respect par le maître des signaux d’apaisement émis par le chien est indispensable à sa stabilité émotionnelle. Chapitre 2 - Les malentendus gâchent les relations Les conflits naissent souvent de malentendus. Nous allons voir comment les relations entre M. DureJournée et son chien Jeb peuvent se détériorer en quelques instants. Le point de vue de M. DureJournée M. DureJournée rentre du travail. Sa journée a été difficile, comme souvent, et il aspire à un moment de détente. Il passe la porte en marchant lentement, tête basse et dos voûté, perdu dans ses pensées. Dès qu’il a franchi le seuil, son jeune chien Jeb l’accueille joyeusement et lui saute dessus en jappant. M. DureJournée ne réagit pas et soupire : « Sois gentil, attends que je me sois reposé ! » Il va jusqu’à la cuisine, toujours suivi du chien sautillant autour de lui, se sert une boisson fraîche et s’installe dans son fauteuil devant son émission de télévision préférée. Le chien s’éloigne, M. DureJournée songe : « Brave chien, il me laisse tranquille… » Il se laisse absorber par la télévision. Tout à son émission, il n’a pas vu Jeb revenir, mais le bruit que fait son chien à côté de lui le dérange (il ne le voit pas dévorer son journal favori). Il lui intime d’un ton las : « Arrête un peu de bouger, retourne te coucher. » Cependant, l’agitation continue dans son dos ; sans cesser de regarder son émission, M. DureJournée répète, excédé : « Jeb, pour la dernière fois ! Je t’ai dit d’aller te coucher ! » Détournant finalement son regard du petit écran, il se penche vers son chien et découvre le journal déchiqueté : « Mais qu’est-ce que tu fabriques ? » M. DureJournée se lève d’un bond : « Jeb ! Arrête ça tout de suite ! » Le chien part en courant, emportant l’objet du délit. Il le nargue ! M. DureJournée lui emboîte le pas : « Jeb ! Lâche ce journal ! Reviens ! » Après une brève poursuite, il rattrape son chien, le saisit par la peau du cou et le secoue : « Tu as vu ce que tu as fait ? » Jeb se débat, se retourne, mord la main de son maître et détale sous le canapé. M. DureJournée en reste interdit. Son quotidien est tout déchiré et il s’est fait mordre par son chien ! « Vraiment une dure journée ! » se dit-il en retombant dans son fauteuil, « même le chien s’y met… » Il est fatigué, il sait qu’il ne s’y est pas pris comme il faut, mais quand même, est-ce bien normal que son chien le morde ? Le point de vue de Jeb (’bien dormi) Jeb s’étire en poussant un long soupir. Il a bien dormi, et l’heure du retour de son maître approche. Il en est déjà tout émoustillé et guette son arrivée par la fenêtre. Ah, il entend sa voiture dans le jardin : « Oui, c’est bien lui ! » Jeb s’agite, va et vient dans l’entrée. Les pas familiers, le bruit de la clé dans la serrure, la porte s’ouvre… Le voilà ! Jeb se précipite et saute à sa rencontre… mais son maître poursuit son chemin. « Ça ne marche pas, il ne m’a sûrement pas vu, peut-être faut-il sauter plus haut ? Ah, ça y est ! » : son maître semble enfin l’avoir remarqué. « À quoi veut-il jouer ? » Ce n’est pas très clair, il le repousse avec ses mains en parlant gentiment comme s’il voulait démarrer un jeu, mais en même temps, il ne bouge pas… « On commence une poursuite, alors ? On y va ? Mais que fait-il ? » Jeb, perplexe, voit son maître s’asseoir dans son fauteuil… « Voyons, où se trouve son jouet, ce papier qu’il aime tant… » M. DureJournée a longuement tenu ce journal en main et l’a abondamment marqué de son odeur. « Le voilà ! Mon maître ne pourra sûrement pas résister à ce jouet-là ! » Jeb est tout excité, il commence à mâchouiller le journal. Quand il est énervé, il faut qu’il ait quelque chose dans la gueule, et il ne peut pas s’empêcher de le mastiquer. Ah ! Son maître lui parle ! Jeb a bien reconnu son nom, mais il ne comprend pas le reste des mots. M. DureJournée s’est à nouveau retourné. Jeb décide qu’il est temps de l’inviter à participer à son jeu : il redouble ses efforts en remuant la queue. Enfin, son maître s’adresse à lui et se tourne maintenant dans sa direction : veut-il reprendre le jeu de course ? Jeb s’enfuit en courant et emporte le jouet, s’attendant à être poursuivi… Son maître se lève et le pourchasse effectivement. « Ho, ho, il a l’air en colère… Que s’est-il passé ? On ne joue plus ? » Pas de doute, cette fois, ce n’est plus du jeu ! Jeb voudrait s’enfuir, le plus vite et le plus loin possible, mais la porte est fermée. Il sent que son maître est très en colère. Une fois rejoint, Jeb s’aplatit au sol, et se laisse passivement retirer le jouet de la gueule. Les pages du journal sont toutes déchirées. Jeb voit bien que son maître est très énervé. Il cherche à stopper sa vindicte : il se couche sur le dos. Normalement, cela devrait marcher, avec sa mère en tout cas, cette méthode fonctionnait toujours. Toutefois là, à sa grande frayeur, il est pris par le cou et cela lui fait mal ! Comment mettre fin à cette situation ? Il ne voit plus qu’une solution : un effort, une contorsion, il se dégage et mord cette main qui le fait souffrir et qu’il ne sait comment arrêter. Ensuite, aux abris ! Vite ! Sous le canapé, on le laisse en général tranquille… PRENONS DU RECUL Les demandes d’attention du chien M. DureJournée est fatigué et souhaite du calme. Avant de pouvoir se consacrer à Jeb, il a besoin de s’isoler un peu. Inversement, Jeb a été privé de contacts depuis le départ de son maître, aussi sa demande est-elle très forte. Le maître et son chien sont donc dans des dispositions totalement opposées au moment où ils se retrouvent : le chien sollicite de l’attention et du mouvement ; le maître réclame un peu de tranquillité. Jeb s’aperçoit qu’il est difficile de solliciter M. DureJournée dans les instants qui suivent son retour. Il lui faut redoubler d’efforts pour obtenir un regard. Le saviez-vous ? Obtenir l’attention de son partenaire est une étape indispensable pour toute communication réussie. Pour cela, il faut tout d’abord être capable de l’interrompre dans son activité au moyen d’un signal qu’il puisse percevoir. Tous les chiens apprennent rapidement à se positionner dans le champ visuel de leur maître pour attirer son attention. Ils peuvent également gémir, aboyer, venir au contact ou utiliser simultanément ces trois modalités. Les chiens de petite taille, comme Jeb, se montrent en sautant, en aboyant, voire en montant sur les genoux ou en occupant une position surélevée. Bien souvent, les « bêtises » que font les chiens sont en réalité des expériences visant à mettre en place des stratégies efficaces pour attirer l’attention. S’emparer d’une pantoufle, d’une revue, ronger le pied d’un meuble, toutes ces actions déclenchent immanquablement une réaction des maîtres. Ces réponses des propriétaires constituent pour le chien autant de renforcements positifs, qui vont provoquer une répétition de l’acte et le systématiser : si la technique est efficace, le chien la réutilise ! Elle devient alors un code de communication, qui possède une signification (« regarde-moi, je suis là, je suis présent ») et déclenche une réaction prévisible et appréciée. Il ne faut cependant pas croire que chaque fois qu’un chien vole ou détruit un objet, il le fait pour attirer l’attention. Il existe d’autres motivations, telles que le jeu ou la gourmandise… Jeb espère que son maître va se lever et venir jouer avec lui. En attendant, il patiente en se livrant à une tâche qui lui procure beaucoup de satisfaction : déchiqueter du papier. Le saviez-vous ? Les activités orales de ce type procurent aux chiens, surtout aux plus jeunes, une grande satisfaction : ils adorent tous ronger des os ! Mastiquer constitue parfois une source d’apaisement lors de situations conflictuelles ou frustrantes. Nous pouvons aisément le concevoir, nos capuchons de stylo à bille ou nos extrémités de crayon payant un lourd tribut à ce type d’activité. Hommes et chiens ont même en commun de faire face au stress en se rongeant les ongles ! Dans le cas de Jeb, la destruction du journal est également une stratégie de demande d’attention, qu’il a déjà éprouvée : il sait qu’elle est efficace et que son maître va réagir. Il est préférable que M. DureJournée n’ignore pas Jeb lorsqu’il rentre, qu’il canalise l’énergie de son chien en lui accordant quelques instants dès son retour, même si les activités sont reportées à plus tard. Plus le chien a la sensation de ne pas être vu, plus il est envahissant, plus son exigence est grande ! Mieux vaut lui adresser dès le début un salut, et faire ainsi disparaître la grande tension qui résulte de la privation de contacts, il pourra alors patienter. « Parler » ne suffit pas Quand M. DureJournée parle à son chien, Jeb ne réagit pas. Pourquoi ? Tout d’abord, son maître n’a pas réussi à émettre un signal suffisamment fort pour attirer son attention : M. DureJournée « explique » à son chien ce qu’il attend de lui, le ton employé est las, et ne s’accompagne d’aucun mouvement corporel. En effet, le maître reste devant sa télévision : il n’a pas bougé, et son regard ne s’est pas tourné vers Jeb. Celui-ci a bien entendu son nom, mais rien ne se passe et, bien sûr, le sens de la phrase lui échappe. Reste la musicalité des mots prononcés, le ton doux employé, insuffisants pour interrompre Jeb dans son activité. Un ordre verbal ne prend son sens et ne provoque la réaction attendue que s’il est donné de manière congruente avec les autres signaux émis - c’est-à-dire si l’ensemble des signaux s’accordent pour constituer un message. Le maître de Jeb prononce un mot correspondant à un ordre, mais il reste immobile à fixer la télévision et n’oriente pas son corps vers le chien : pour ce dernier, son maître n’a donné aucun ordre ! Comment en sont-ils arrivés à cette situation ? En partie parce que les chiens et les humains ne privilégient pas les mêmes modes de communication. Les humains communiquent beaucoup en utilisant les sons, les mots : le langage. Ils oublient très souvent que le langage n’est pas accessible aux chiens, tellement ces derniers semblent parfois bien les comprendre. Ainsi, M. DureJournée croit donner une information complète à Jeb en formulant une phrase complexe, et il se dispense d’accompagner son message de signaux posturaux. Il n’est pas idiot, il sait bien que son chien ne comprend pas les mots, mais fatigué, il se comporte de manière un peu automatique… Le saviez-vous ? Le chien, s’il ne peut comprendre de longues phrases, a la capacité de mémoriser un certain nombre de mots, pour peu qu’ils lui aient été enseignés. Il va repérer ces termes dans les paroles prononcées, et les associer à des actions ou à des objets. Toutefois, son cerveau ne lui permet pas d’aller au-delà et d’accéder à la complexité de notre langage. En revanche, les chiens sont très performants en matière d’observation de la gestuelle de leur interlocuteur : ils s’attachent à la position du corps, aux mouvements (brusques, hésitants, fluides), à l’occupation de l’espace. Ils sont aussi capables d’identifier parfaitement la tonalité d’un discours (le timbre, l’intensité, le rythme), tout ce que l’on appelle la production non verbale. Chez les humains, cette dernière sert à rythmer le discours, à le souligner, à maintenir l’attention et à livrer toutes sortes d’informations complémentaires qui portent sur les émotions et sur la relation entretenue avec l’interlocuteur. Ainsi, une tête penchée sur le côté manifeste de l’attention, des bras croisés sur la poitrine peuvent signifier le rejet, des lèvres pincées le mépris… Nous percevons ces signaux de manière souvent inconsciente, mais nous n’y faisons vraiment attention que lorsqu’ils ne sont pas en accord avec le message verbal (un peu comme lorsque nous regardons de mauvais acteurs ou des téléfilms mal doublés). Lorsque nous parlons à notre chien, nous poursuivons des objectifs variés : partager une émotion, donner un ordre ou… simplement briser le silence. Les chiens sont parfaitement capables d’identifier nos émotions (et sans doute mieux que nous), sans d’ailleurs avoir recours au langage (ce sont de parfaits détecteurs de mensonge). En revanche, identifier le contenu d’un message est pour eux bien plus difficile. À nous de nous mettre à leur niveau en tenant compte de leurs possibilités ; nous verrons plus loin comment y parvenir. Le saviez-vous ? Les vocalises, pâles substituts canins du langage, sont peu employées par les chiens vivant entre eux sans contact avec l’homme. Bien sûr les chiens aboient, ils utilisent ces signaux pour communiquer à distance lorsqu’ils chassent ou pour avertir d’un danger. Cependant, dans les relations de proximité, ils privilégient les signaux visuels et olfactifs, ainsi que tactiles lorsque l’intimité est encore plus grande. Il est amusant de remarquer que nos chiens domestiques utilisent cependant toute une gamme de gémissements et d’aboiements, un peu comme si le fait de vivre au contact des humains les incitait à « parler ». La naissance de quiproquos Le fait de manger un journal n’a pas la même signification pour Jeb et pour son maître… Et pourtant, observons les gestes saccadés de M. DureJournée lorsqu’il se lève pour récupérer son journal. Sont-ils très différents de ceux qu’il aurait pu avoir au cours d’une partie de ballon avec son chien ? M. DureJournée se comporte exactement comme s’il démarrait un jeu avec son chien, comme s’il voulait lui aussi « jouer au journal »… Dans le monde de Jeb, les postures de jeu sont parfaitement codifiées : il s’agit de mouvements exprimant à la fois l’agression et la soumission, exécutés d’une manière rapide et hachée. La notion de vitesse est très importante : l’œil du chien est particulièrement adapté à la perception du mouvement. Le chien privilégie ces informations, comme nous humains nous attachons aux mots prononcés. La dynamique de M. DureJournée conduit Jeb à interpréter sa réaction comme une acceptation du jeu. Il se met donc aussi en posture de jeu : derrière en l’air, queue frétillante. Pour son maître, qui n’est pas d’humeur à jouer, cette invitation est vécue comme une provocation : Jeb semble se moquer de lui ! M. DureJournée est énervé et l’exprime clairement : son ton est menaçant, ses postures aussi. Son chien interprète parfaitement le message : les deux espèces expriment de la même manière la colère et les menaces qui y sont associées. Il comprend donc qu’il doit s’éloigner rapidement. Néanmoins, en s’enfuyant, il n’obéit pas aux injonctions de son maître qui lui crie de revenir ; celui-ci est maintenant parfaitement convaincu que Jeb se moque de lui. Le chien impertinent se double alors d’un chien désobéissant ! Les messages de chacun donnent lieu à un double quiproquo, la situation est bien mal engagée… La punition M. DureJournée a maintenant deux objectifs : récupérer son journal et punir son chien. Il pense que le secouer par la peau du cou équivaut à une punition. Or dans le monde de Jeb, cette façon de faire correspond à une agression, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent. Le chien a répondu à la menace d’une manière parfaitement adaptée à son univers : il s’est retiré, puis s’est placé en position aussi basse que possible afin d’apaiser la colère de son maître. Rien n’y a fait, son propriétaire a continué imperturbablement ce qu’il avait décidé de faire. Face à cette agression, et ne pouvant plus s’enfuir, Jeb n’a que deux solutions : combattre ou se soumettre. Conscient de ses capacités physiques, il choisit sagement la soumission. Il s’attend à ce que cette attitude mette fin au conflit, mais M. DureJournée, très fâché, sévit et pense qu’il doit sévir longtemps. Le saviez-vous ? Si nous envisageons la punition comme un outil pédagogique, et non comme l’expression d’une colère, une punition longue dessert l’objectif initial. La punition immédiate, intense et courte est bien plus efficace ! Les messages d’apaisement que Jeb envoie ne sont ni compris ni respectés. La tension est à son comble, l’incompréhension maximale… Or Jeb n’est pas un chien qui se résigne, il a mal et ne comprend plus cette situation dans laquelle rien de ce qu’il sait faire ne fonctionne. C’en est trop : il se retourne et mord son maître, dans un réflexe de combat. Semblant lui-même surpris de son audace et craignant une nouvelle réaction qu’il ne saurait contrôler, il cherche un refuge dans lequel il ne pourra être atteint. Cette réaction doit conduire M. DureJournée à réfléchir, car s’il réagit en intensifiant ses punitions, le pauvre Jeb risque d’éprouver de grandes difficultés émotionnelles chaque fois que son maître sera en colère. La qualité de leur relation est en jeu ! QUELQUES OUTILS Une fois que la situation a dégénéré, il est quasi impossible d’éviter l’incident. La meilleure solution est donc de désamorcer le piège, en mettant en place des stratégies préventives. L’état émotionnel de chacun, les apprentissages du chien et les connaissances du maître, la capacité à prêter attention et à interpréter correctement les messages échangés, toutes ces données sont intervenues dans la genèse de cette situation. M. DureJournée aurait pu réagir aux invitations à jouer, détourner l’attention de Jeb pour lui reprendre le journal au lieu de le poursuivre, lui donner l’ordre de revenir sans se mettre en colère… Toutes ces conduites alternatives doivent être mûrement réfléchies et mises au point dans un contexte serein (nous sommes conscients que M. DureJournée était incapable d’y parvenir ce jour-là). C’est en analysant les faits à froid que l’on évite de se laisser emporter par ses émotions. Nous vous livrons ici ce qu’il faut savoir pour se protéger d’un grand nombre de malentendus, ainsi que des méthodes applica35 bles pour récupérer un objet pris par un chien (comme dans cette situation) et enfin une réflexion stratégique autour de la punition. Transmettre des messages efficaces Nous entendons très souvent des personnes se plaindre de leur chien : « il ne comprend rien », « il n’écoute pas », « il est têtu ». Avant de conclure que votre chien est stupide ou qu’il fait preuve de mauvaise volonté, mieux vaut vous interroger sur la qualité de vos messages : lui sont-ils clairement adressés ? Sont-ils compréhensibles ? Cohérents ? Retenir l’attention du chien Tout d’abord, il est essentiel de faciliter la tâche du chien en commençant par se tourner vers lui et par s’exprimer dans sa direction, et en faisant précéder le message par son nom. Vous attirez son attention et lui indiquez, comme une ponctuation, que votre « communiqué » commence là. Cette première étape de focalisation de l’attention est fondamentale. Vous pouvez considérer que vous avez atteint votre but lorsque le chien vous regarde : c’est le moment de l’encourager pour conserver son attention. Délivrer un message clair Ensuite, les signaux envoyés doivent se détacher du « bruit » environnant (ce terme qualifie tous les signaux parasites et surajoutés inutiles à la compréhension du message). Ils doivent aussi être d’une intensité suffisante et les plus simples possible. Ceci constitue la deuxième étape, celle qui donne sa lisibilité au message. Un message lisible permet au chien de filtrer parmi la multitude de signaux qu’il reçoit ceux qui lui semblent pertinents. Prenons un exemple : dans un lieu très animé et bruyant, nous avons du mal à suivre une conversation, les sons se mêlent et il est difficile de distinguer ceux qui nous intéressent. Il en va de même pour le chien : pour comprendre une information, il doit distinguer les « mots » qu’il connaît au milieu d’autres sons, sans se laisser distraire par une gestuelle compliquée ou des déplacements inutiles. Il est souhaitable d’éviter les longues digressions, qui ont surtout pour effet de « noyer » le chien dans un flot de paroles. Les mots isolés sont ainsi préférés aux phrases, les gestes simples aux mouvements désordonnés. Adopter une attitude cohérente Enfin, l’ensemble du message doit rester congruent pour le chien (les différents signaux doivent s’accorder). Nous avons du mal à apprécier ce critère, car le chien vit dans un univers sensoriel différent du nôtre. Tandis que nous privilégions les éléments visuels et la signification des paroles entendues, le chien, quant à lui, donne sans doute la priorité aux odeurs, aux mouvements et aux postures. Le sens des phrases lui échappe, même si certains mots sont évocateurs. Lorsque vous dites à votre chien « Assis ! », vous pensez lui donner un ordre verbal, limité au mot assis connu du chien. En réalité, l’ordre que reçoit le chien est constitué tout à la fois du ton que vous employez, de la courbure de votre dos, de la direction de votre regard vers le sol et de votre bras qui s’abaisse tandis que votre tête bascule légèrement en avant. Essayez de donner cet ordre sans prononcer le mot ou en le remplaçant par « Vélomoteur ! », il y a de fortes chances que le chien l’exécute. Inversement, prononcez « Assis ! » en étant vous-même assis et en regardant le ciel, votre chien ne s’assiéra certainement pas. La première chose que le chien perçoit est votre état émotionnel. Il est donc nécessaire que les ordres ou les signaux ne se contredisent pas. N’espérez pas qu’en disant : « Tu es puni, va te coucher ! » d’une voix enjouée, le chien obtempère. Il va plutôt réagir à votre joie en vous invitant au jeu… Terminer la communication S’il est utile d’indiquer le début d’une communication, il est tout aussi logique d’en marquer la fin (on pourrait dire « terminer la phrase », tant l’analogie est valable). Par exemple, dans l’ordre « Assis ! », quand l’échange initié prend-il fin ? Au moment où le chien s’assoit ? Eh bien non ! Au moment où le maître indique au chien qu’il a bien agi ! Il peut le faire sous différentes formes : une récompense (une caresse, une friandise) ; un mot habituel de félicitations (« c’est bien ») ; ou simplement la fin d’une menace éventuelle (« relâcher » une posture rigide, arrêter de froncer les sourcils, cesser de faire face au chien…). Dans tous les cas, la validation est indispensable. Nous ne pouvons jamais compter sur une déduction implicite de notre communication, l’implicite est hors de portée du chien. Quelle que soit l’information transmise, nous devons veiller à ce que nos signaux permettent un échange complet qui s’effectue en plusieurs étapes : émission du message par le maître ; réception du message par le chien ; réaction appropriée du chien ; validation de cette réponse par le maître. Si, comme M. DureJournée, vous dites au chien « Va te coucher ! », sans veiller à ce qu’il y aille effectivement, vous dénaturez un ordre (éventuellement) connu pour en faire une phrase vide de sens. La prochaine fois, votre chien ne saura pas s’il doit exécuter ou non l’ordre, puisque votre réponse est identique dans les deux cas. Enseigner demande de la constance Pourquoi attirer votre attention sur cette nécessaire constance ? Parce que ce n’est pas si facile ! Dès la première exécution, le chien semble avoir compris ce que nous lui demandons ; en réalité, nous nous persuadons qu’il a compris, mais nous ne le vérifierons que la prochaine fois. Or précisément la fois suivante, le chien entame une vérification de ce qu’il a compris. Cela peut supposer de sa part des tâtonnements, des essais, pour se faire préciser clairement ce qu’on attend de lui. Et comme il s’agit de vérification, vous devez fournir exactement la même réponse ! Nulle place ici à l’exaspération, ni aux ajouts comme « Je te l’ai déjà dit ! », ou « Tu te moques de moi ! » En effet, ces ajouts ne peuvent que perturber votre message et le modifier suffisamment pour faire échouer la vérification. Avec un chien, enseigner, c’est répéter à l’identique… « Non ! », c’est « Non ! » Quand vous dites « Non ! » à votre chien, que voulez-vous qu’il fasse ? Vous souhaitez qu’il arrête ce qu’il est en train de faire. Et ensuite ? Si vous le laissez sans indication, il ne peut pas savoir ce que vous attendez de lui. Or vous ne disposez pas de mots pour vous expliquer. Peut-il continuer ce qu’il faisait ? Faire autre chose ? Doit-il ne plus bouger ? C’est à vous de le guider… Imaginons votre chien s’approchant d’une plante que vous ne voulez pas qu’il touche. Dans un premier temps, vous l’interrompez d’un « Non ! » sec et sonore. Il sursaute et se tourne vers vous, interrogatif. Demandez-lui alors de venir vers vous, et caressez-le dès qu’il arrive. Frustrant, sans doute ? Vous n’avez pas pu lui expliquer que cette plante pourrait être dangereuse pour sa santé s’il la mangeait. Pourtant, vous avez réalisé un parfait début d’apprentissage… Dans un deuxième temps, votre chien va vérifier ce qu’il a compris. Il s’approche de la plante plus lentement, en jetant des coups d’œil vers vous, guettant votre réaction. Vous pourriez songer « il me nargue, il me défie », mais non, il vérifie ! Vous devez impérativement réagir exactement de la même manière que la première fois : un « Non ! » sonore, suivi d’un appel et d’une caresse. Si vous avez réussi, le chien a compris et vous n’aurez pas à le refaire ; sinon, persévérez et maintenez l’enchaînement action-réaction-rappel-récompense. C’est la méthode qui donne les meilleurs résultats, et les plus rapides. Quelques pistes pour récupérer un objet C’est toujours lorsque vous êtes pressé ou fatigué que votre chien attrape un objet auquel vous tenez : vous êtes sur le point de partir au travail, vous êtes déjà un peu en retard, et le chien s’enfuit dans le jardin avec les chaussures que vous vous apprêtiez à enfiler ! Ce n’est pas le moment de faire de l’éducation, il vous faut récupérer ces satanées chaussures. Malheureusement, nous ne pouvons vous fournir de véritable astuce. Vous allez devoir utiliser toutes les techniques que vous aurez mises au point précédemment. Si vous n’en avez aucune, il est décidément trop tard… L’utilisation d’un automatisme comme l’exécution d’un ordre ou l’obéissance au rappel suppose que ces notions soient déjà connues du chien. Procédons par élimination, voyons déjà ce que vous ne devez pas faire : poursuivre le chien : c’est ce qu’il attend ! Il cherche en effet à retarder votre départ en vous faisant jouer. Si vous avez un employeur compréhensif, expliquez-lui que vous éduquez votre animal domestique pour justifier votre retard… Sinon, ne vous lancez pas derrière votre chien ; tirer sur l’objet que vous aurez réussi à attraper dans la gueule du chien : comme précédemment, vous participez au jeu. Peut-être gagnerez-vous cette fois, mais vous aurez surtout gagné une partie gratuite la prochaine fois ; crier et gesticuler : vous contribuerez à renforcer l’excitation du chien. Vous donnerez l’impression au chien que vous voulez jouer, même s’il ne comprend pas vos règles du jeu (comme M. DureJournée) ; vous mettre en colère (il est vrai que rester calme ne se commande pas facilement) : le chien perçoit votre émotion et risque de ne plus répondre à aucune injonction. Chez les chiens, l’irritation d’un dominant interdit que l’on s’approche de lui (nous le verrons dans le chapitre 4 avec Titom et Toufou), votre chien va donc rester à distance dans le but de vous apaiser… Alors, que vous reste-t-il à faire ? proposer un autre objet au chien. Choisissez un jouet qu’il aime particulièrement, et lancez-le à une certaine distance, pour qu’il puisse le prendre sans trop s’approcher de vous. En effet, s’il a senti de l’agacement dans vos attitudes, il ne voudra pas venir près de vous ; lui ordonner de s’asseoir. S’il sait exécuter cet ordre et qu’il vous obéit, alors il vous donne le contrôle, il se place sous votre autorité. Félicitez-le, récompensez-le en le caressant, et pourquoi pas en lui donnant une friandise. S’il n’a jamais lu Le corbeau et le renard, il lâchera l’objet dérobé pour prendre la récompense ; l’appeler très gentiment comme si vous vouliez le caresser. Cette stratégie suppose que vous possédiez une maîtrise exceptionnelle de vos émotions (contactez-nous pour nous dire comment vous faites, nous en avons parfois besoin nous-mêmes !). Nous l’avons dit, le chien est très sensible aux signaux qui accompagnent le message. Ainsi, si tout votre corps est contracté, votre tension lui interdit de s’approcher. Le chien obéit à l’injonction posturale (interdiction d’avancer) plutôt qu’à la demande verbale (demande de s’approcher), et il ne vient pas ; partir dans une autre direction, en vous agitant et en tapant dans vos mains. Si vous parvenez à intriguer le chien, il viendra voir ce que vous faites et changera de centre d’intérêt ; chasser l’idée d’aller travailler et rester jouer avec votre chien. Non, finalement ce n’est pas vraiment une solution… L’emmener au travail ? Certains ont la chance de pouvoir le faire ! rester totalement indifférent : sacrifiez votre paire de chaussures et enfilez-en une autre ! (Hum ! Hum !) ; ne plus rien laisser traîner ! Ces techniques ne sont pas réutilisables à chaque fois, aussi pensez à changer l’ordre de vos préparatifs de départ, de manière à ne pas vous exposer à ce genre de désagrément. Le chien peut par exemple être enfermé ou attaché quelques instants, afin de rester contrôlable au moment où vous quittez la maison… Savoir mettre fin à une punition Nous l’avons vu, une punition ne s’improvise pas ! Avant de réprimander Jeb, M. DureJournée doit savoir ce qu’il cherche précisément à obtenir, sinon il se retrouve en train de sévir sans qu’aucune réponse de son chien ne puisse interrompre sa punition. Quand nous sanctionnons, nous savons quel comportement nous désirons faire cesser. Savons-nous toujours ce qui va nous interrompre ? Ce que doit faire le chien pour faire cesser la correction ? Cette réflexion préalable est indispensable pour déterminer à quel moment et de quelle manière la punition prend fin. Le chien ne va pas dire : « Pardon, je ne le ferai plus ! » N’oubliez pas que les chiens ne parlent que dans ce livre et grâce à notre imagination… Que peut-il faire alors ? Émettre des signaux d’apaisement : abaisser sa posture, ses oreilles, sa queue, regarder par en dessous et s’éloigner. Il peut même aller jusqu’à une posture de soumission : immobile et couché sur le côté ou sur le dos. Il ne peut faire grand-chose de plus ! Et encore, la soumission est un message extrême : si votre chien en arrive là, c’est que vous en avez déjà fait beaucoup dans le registre de la menace, réfléchissez pour savoir si votre attitude est proportionnelle à vos intentions. À partir de maintenant, vous commencerez une punition en sachant qu’elle doit se terminer en face de tout message d’apaisement, ce n’est pas facile… et c’est souvent frustrant ! Néanmoins, c’est indispensable. Si vous ne cessez pas vos menaces aux premiers signes d’apaisement, votre chien est envahi par ses émotions ; il réagit sous le coup de la peur et peut en arriver à vous mordre, comme l’a fait Jeb. Si en revanche vous vous arrêtez instantanément, votre chien ne vous craint pas, car il sait comment vous arrêter : vous êtes « contrôlable ». Les idées du chien restent claires, et vous avez alors bien plus de chances qu’il retienne ce que vous lui enseignez. Vous pouvez même l’appeler pour le caresser quelques instants plus tard, il n’en sera que plus sûr d’avoir correctement répondu à vos demandes et recherchera cette satisfaction la prochaine fois. La répétition de la scène - et non sa durée - permettra au chien de repérer les actes qui déclenchent votre réaction, afin de les éviter à l’avenir. Le saviez-vous ? Si le chien subit des punitions sans que ses messages d’apaisement ou de soumission n’y mettent fin, il risque de développer une crainte de ces situations. Quand cette appréhension devient permanente, elle se transforme en anxiété. Confronté à des situations qu’il ne peut modifier par ses réponses, le chien développe ce que les scientifiques nomment une impuissance acquise. Devant l’échec des réponses qu’il tente, il finit par ne plus essayer de modifier le cours des choses. Il ne fait plus qu’attendre et se résigne : c’est un modèle expérimental de dépression utilisé pour étudier les mécanismes cérébraux entrant en jeu dans l’apparition de cette maladie. Lorsque la punition a pour but de faire cesser un comportement, il n’est pas toujours aisé de savoir si le chien a compris, et ce qu’il a intégré. S’arrête-t-il parce qu’il a compris ce qu’on attendait de lui ou parce qu’il redoute une nouvelle sanction ? Le seul moyen de le savoir est de « valider » la réponse du chien en le rappelant pour le récompenser. La manière dont il revient nous renseigne : s’il est joyeux et s’approche avec entrain, c’est qu’il est heureux d’avoir donné satisfaction à son maître ; sinon, il faut revoir le message… IDÉES REÇUES « Le chien comprend tout, il ne lui manque que la parole ! » Ce serait tellement pratique, et si simple… Si c’est vrai, vous pouvez refermer ce livre ! L’intelligence du chien va certainement bien au-delà de ce que nous voulons bien lui concéder, mais sachons modérer notre enthousiasme et appliquons-nous surtout à bien nous faire comprendre. « Pour que le chien « comprenne », la punition doit être suffisamment longue. » Si vous punissez longtemps, le chien ne comprend qu’une chose : il faut avoir peur de vous. Le plus important dans une punition est le moment où elle est effectuée et non sa durée. Pour être véritablement efficace, la punition doit être appliquée simultanément à la faute et de manière systématique. « La main qui caresse ne doit pas être la main qui punit. » Faux : le chien n’est pas idiot ! Même si vous prenez un journal, il sait bien que c’est vous qui tenez le journal. Par ailleurs, vous avez le droit de vous mettre en colère, à condition de respecter les règles d’apaisement du chien. De toute manière, le temps d’aller chercher le journal, le chien est déjà passé à autre chose et la punition n’est plus efficace. RÉCAPITULONS Les quiproquos entre maîtres et chiens tiennent au fait que dans la communication, les humains privilégient le langage « parlé », alors que les chiens sont sensibles au langage non verbal. Toute communication réussie nécessite d’abord de retenir l’attention de son partenaire puis de rendre ses messages à la fois lisibles et congruents. Enseigner, c’est répéter à l’identique. La constance est pédagogique. Lorsqu’un message est envoyé au chien, il faut vérifier qu’il est arrivé à destination et qu’il a été compris. L’ensemble de la communication ne se termine qu’après avoir validé la réponse correcte du chien en le félicitant. Reprendre un objet au chien demande de la patience et de la créativité pour ne pas rentrer dans son jeu. La punition est un acte qui ne s’improvise pas et qui répond à des objectifs préétablis. C’est la répétition de la punition, et non sa longueur, qui conditionne son efficacité. Chapitre 3 - La famille s’agrandit M. et Mme FairePart sont heureux : ils attendent la naissance de leur premier enfant. Leur joie est toutefois teintée d’inquiétude et de culpabilité : Comment leur chien va-t-il prendre la chose ? Va-t-il souffrir, se sentir rejeté, abandonné ? Va-t-il être jaloux et se venger sur l’enfant qui prend sa place ? Comment se conduire pour éviter toutes ces catastrophes ? Si des changements sont nécessaires, il va falloir se dépêcher de les mettre en place, car la naissance est prévue dans deux mois ! Retrouvons notre petite famille recevant ce dimanche quelques amis et leurs enfants dans le jardin… Le point de vue de Mme FairePart C’est un bel après-midi d’automne, Mme FairePart se sent bien. Un peu lasse en cette fin de grossesse, elle profite des températures douces. Il fait si bon dans le jardin ! Elle est entourée de ses amis, venus avec leurs enfants. L’animation autour d’elle la conduit à imaginer son enfant à naître… Le regard dans le vague, elle caresse presque machinalement son chien Youpi. Comme d’habitude, celui-ci est tout contre elle. Depuis qu’elle est enceinte, il ne la quitte pas ! Elle lui parle souvent du bébé, de tout ce qu’ils vont pouvoir faire ensemble… Un de ses amis s’approche pour lui parler. Mme FairePart sent le corps de Youpi se raidir. Elle se penche vers son chien et lui parle doucement : « Mais non, n’aie pas peur ! Enfin, tu le connais, il ne t’a jamais fait de mal ! » Youpi est bien nerveux ces temps-ci, il semble contrarié, mais par quoi ? Peut-être a-t-il simplement peur des hommes ? Sûrement, car lorsque les enfants s’approchent à leur tour, Youpi se comporte différemment : il se fait tout gentil, il baisse la tête devant eux et attend les caresses. Mme FairePart est rassurée : c’est bien le chien qu’il faut pour son futur bébé ! Lorsque les enfants arrêtent de le câliner, il leur soulève la main et leur donne un coup de langue au passage. Ils ont même droit à un baiser sur le visage… Quelle tendresse ! Le goûter est servi. Mme FairePart partage son gâteau avec Youpi. Elle l’observe faire quelques tentatives auprès des enfants et leur recommande de ne pas trop lui donner de pâtisseries pour ne pas le faire grossir. Les enfants décident de jouer au ballon dans le jardin. Pour ne pas être bousculée, Mme FairePart se tient à l’écart, le chien à ses côtés. Celui-ci laisse échapper quelques gémissements, comme s’il était impatient de rejoindre ceux qui s’amusent à la balle (il adore y jouer)… « Tu peux y aller si tu veux », lui dit sa maîtresse, « mais ne les poursuis pas ! » Les enfants courent et crient. Youpi se mêle à eux en galopant et en aboyant, tout excité. « Reviens ici ! », intervient tout à coup Mme FairePart. Son chien vient en effet d’attraper le pantalon d’une petite fille et de la faire trébucher. « Tu es vraiment maladroit, tu ne dois pas faire tomber les enfants ! Avec le bébé, il faudra être plus calme ! » Mme FairePart le réprimande d’autant plus qu’elle redoute la réaction des parents présents. Ce sont des amis, mais tous ne sont pas des inconditionnels des chiens. Elle se méfie des reproches en cas d’incident, et de l’éventuelle discussion qui pourrait suivre à propos de la cohabitation à venir de Youpi et du bébé. Elle a déjà souvent eu cette conversation, qui a tendance à la déprimer. Mme FairePart en a assez des mises en garde des gens qui n’aiment pas les chiens ! Le point de vue de M. FairePart M. FairePart s’affaire pour accueillir au mieux ses invités et permettre à son épouse de se reposer. Il va et vient tout en discutant avec ses amis, observant du coin de l’œil Youpi aux côtés de sa femme. « Il veille bien sur elle », se dit-il, en se demandant qui, de sa femme ou du chien, protège l’autre. « Finalement, il me seconde bien ! » Un de ses amis lui glisse un commentaire amusé : « Tu n’as pas peur que ton chien prenne ta place ? » Eh ! M. FairePart ne l’avait pas vu sous cet angle… La réaction de Youpi lorsqu’un invité s’approche de son épouse confirme la fonction que pourrait jouer le chien auprès de la maîtresse de maison. « A-t-il déjà mordu quelqu’un ? », demande un ami à M. FairePart. « Non ! Jamais ! », répond-il promptement, tout surpris de se trouver confronté à cette interrogation. Jusque-là, ni lui ni son épouse ne s’était posé la moindre question à ce sujet. M. FairePart sent la fibre paternelle monter en lui, et l’inquiétude fait son apparition : « Youpi peut-il mordre ? Mais non ! C’est Youpi, il n’est pas capable de faire une chose pareille. » Tout à ses réflexions, M. FairePart sert le goûter aux enfants et aux parents. Il est attendri quand il voit les regards que lance Youpi pour obtenir de la nourriture… Lui-même se sait capable de fondre devant cette façon de demander ! C’est une bonne chose que les enfants lui donnent une partie de leur goûter, cela soude leur relation. D’ailleurs, le chien leur quémande des caresses, ce qui prouve qu’il se sent bien avec eux. Quand les enfants se mettent à jouer au ballon, M. FairePart s’éloigne avec deux de ses amis pour pouvoir parler sans être dérangé par le bruit. Alerté par les cris de sa femme, il accourt sur les lieux de l’incident, pour constater que l’un des enfants est tombé et que son pantalon est déchiré ! Après un bref instant de panique, il écoute les explications de son épouse et s’en trouve totalement rassuré : l’incident a eu lieu en jouant… Et puis Youpi est en train de lécher les mains de l’enfant, comme pour s’excuser. Malgré tout, il va falloir réfléchir sérieusement, car décidément, la cohabitation des enfants et du chien est source d’inquiétude. Doit-il tenir compte de l’avis de son épouse, qui défend ostensiblement Youpi, ou écouter ses amis qui mettent en avant les dangers que courent les enfants en présence de chiens ? C’est son devoir de père d’assurer la sécurité de sa progéniture… Le point de vue de Youpi (la famille s’agrandit !) Youpi protège bien sa maîtresse depuis qu’il sait qu’elle est enceinte. Comme elle reste davantage à la maison, il peut se faire cajoler tant qu’il en a envie, et il aime ça ! Pour le moment, il la sent un peu rêveuse ; tout en s’abandonnant aux caresses, il garde un œil ouvert et reste vigilant. « Pourquoi cet homme s’approche-t-il aussi vite ? Attention, il faut respecter ma maîtresse ! Bien, c’est ça, un peu moins vite, et moins fort ! Heureusement que je suis là pour faire observer les règles, ces humains doivent toujours être rappelés à l’ordre ! » Sa propriétaire le caresse pour le féliciter. « C’est bon de savoir que l’on est respecté et que son travail est apprécié ! » Maintenant, ce sont les enfants qui s’avancent. « Que voilà de bons petits ! Bien disciplinés, respectueux, ils se baissent, parlent doucement et câlinent sur commande ! Tiens, un coup de langue pour les féliciter de leur excellente tenue ! » « Ah, le goûter ! Un bon moment pour savoir qui est le patron. Avec ma maîtresse, aucun problème, il est même inutile de demander. Avec les enfants, faisons comme avec mon maître : quelques mimiques et le tour est joué… C’est presque trop facile ! Certains visiteurs sont plus difficiles à manipuler. Bon, ça suffit pour aujourd’hui ! Après, je me sens lourd, et avec tous ces enfants, je suis obligé de surveiller sans cesse leurs allées et venues. Ce n’est pas évident de digérer tranquillement… » « Tiens, je l’aurais parié, les voilà qui se mettent à courir et à crier, j’ai bien fait de m’y préparer. Voila du travail en perspective pour contrôler tout ça ! » Youpi est partagé entre sa mission de garant de l’ordre et son envie de jouer avec eux. Cette dernière l’emporte : Youpi commence à s’agiter avec les enfants en aboyant joyeusement. « Ah, mais cette petite en fait trop, elle est brutale avec son frère, je vais l’arrêter ! » Et Youpi attrape le bas de son pantalon. Pris par l’excitation du jeu, il y va un peu fort, et la petite fille tombe. Comme elle s’est immobilisée (c’était le but de la manœuvre), Youpi lui lèche brièvement les mains, pour renforcer le message, et pour qu’à l’avenir elle ne soit plus aussi agitée. Cependant sa maîtresse l’appelle déjà : « Quel travail aujourd’hui ! Qu’est-ce que ce sera quand le bébé sera là… » Le point de vue des amis (et des parents de monsieur) Les amis présents ce jour-là se divisent en deux « clans ». Pour « les hygiénistes », le gros problème que pose le chien est la saleté. Qu’il s’agisse de ses poils ou de sa salive (pourquoi les chiens lèchent-ils autant les enfants ?), l’animal est à l’évidence une source de germes, d’infections, en un mot de maladies. M. et Mme FairePart ont l’habitude de ces commentaires, car les parents de monsieur les leur font souvent. Ces derniers ne comprennent pas comment leur fils, qui a été élevé dans un univers propre, peut accepter qu’un chien partage son foyer. L’arrivée imminente de l’enfant a encore renforcé leur position. Les jeunes époux ont reconnu que la présence du chien n’était pas souhaitable dans la chambre du bébé, et depuis quelques semaines, Youpi n’a plus accès à cette pièce. Pour le moment, aucune autre concession n’a été faite sur l’organisation de la maison, mais la désinfection fait l’objet de discussions régulières… Le point de vue des amis (et des parents de madame) Le deuxième groupe, celui des « sécuritaires », est très préoccupé par le danger que représente le chien. On lit tellement de faits divers horribles dans les journaux. Qui sait ce qui passe par la tête d’un animal ? Les enfants risquent d’être mordus ! En effet, les spécialistes ne sont pas toujours capables d’expliquer les accidents qui surviennent, et a fortiori de les prévoir. Les chiens sont faits pour vivre dehors, et c’est une pure folie de les faire cohabiter avec des enfants. Là encore, les époux FairePart connaissent bien ces arguments : les parents de madame se font un devoir de les mettre régulièrement en garde à ce sujet. Ils ont toujours été tellement prudents avec leur fille, comment peut-elle à ce point occulter le danger ? La réponse trouvée par les futurs parents a été, là encore, de répondre que la chambre du bébé était dorénavant interdite au chien, et que dans les autres secteurs de la maison, ils seraient là pour le surveiller. Le point de vue de l’enfant à naître Nous avons pris la liberté de faire parler le chien, pourquoi ne pas nous exprimer pour le bébé qui va arriver ? Nous ne prétendons pas traiter ici de l’utilité des animaux domestiques pour les enfants, de nombreux ouvrages développent ce point de vue. Le bienfait de la présence d’un chien pour le développement affectif, sensoriel et moteur de l’enfant est parfaitement connu. Citons aussi l’apprentissage des relations avec les êtres vivants, la prise de conscience de la diversité, la valorisation et la responsabilisation individuelle conférée par les soins apportés à un être dépendant… la liste est tellement longue ! Si l’on interroge les enfants - et les anciens enfants (vous peut-être ?) - élevés avec un chien, ceux qui regrettent sa présence sont très rares, et la plupart ne conçoivent plus leur vie sans animal domestique. Les avantages d’une telle présence sont nettement supérieurs aux éventuels inconvénients - que nous tâchons ici de limiter. PRENONS DU RECUL Amour et protection Le renforcement des liens affectifs Une grande proximité existe entre la maîtresse et son chien. Mme FairePart - sans doute influencée par sa grossesse - se sent encore plus maternelle et protectrice avec Youpi. Ces derniers mois sont ainsi vécus par eux de manière très intense sur le plan affectif. Par « réaction », les conseilleurs qui préconisent la mise à l’écart du chien renforcent encore leur lien. M. et Mme FairePart apportent toute leur affection à leur chien. Ils apporteront aussi toute leur affection à l’enfant à naître, sans pour autant en « enlever » au chien ! Youpi aussi aura une personne de plus à aimer. Rien ne lui est - ni ne lui sera - retiré. Le temps qui lui sera accordé en exclusivité va diminuer, nous en reparlerons, mais il ne sera pas privé d’affection. Les comportements protecteurs La future maman remarque bien que son chien est différent depuis qu’elle est enceinte. Très vite, il s’est mis à la suivre plus souvent que d’habitude. Même lorsqu’il a l’air de dormir, il réagit dès qu’elle se lève, comme s’il la surveillait du coin de l’œil. La présence de visiteurs le met dans des états d’excitation inhabituels, et elle a surpris des regards franchement hostiles vis-à-vis de certaines personnes. Tout se passe comme s’il la gardait, la considérant comme plus vulnérable ou plus menacée. Cette attitude pose un vrai problème, car elle présente un réel danger : le chien peut facilement se méprendre sur les intentions des personnes qui approchent sa maîtresse, et la défendre sans qu’elle soit menacée. Si les mâles se sentent surtout investis de cette mission et la remplissent parfois avec violence, les femelles possèdent aussi cet instinct de défense du groupe et de protection des plus vulnérables. Cette même tendance à la protection collective peut soulever des difficultés plus tard lorsque l’enfant sera approché. Le chien peut se montrer agressif avec les adultes ou les plus jeunes si « son » bébé lui semble menacé, et notamment s’il crie. Le saviez-vous ? Dès le début, la grossesse est connue du chien, qui constitue un détecteur plus performant que tous les tests disponibles en pharmacie ! En effet, pour des raisons d’analogie structurale de nos émissions phéromonales, le chien est capable de percevoir différents états physiologiques chez ses propriétaires. L’arrivée du bébé ne le surprendra donc pas. Cette information peut expliquer des modifications comportementales parfois très précoces chez le chien : attention nettement plus marquée, surveillance des visiteurs, demandes de contacts… Son comportement est purement instinctif, déterminé par sa perception olfactive de l’état hormonal de sa maîtresse. La jalousie Youpi va-t-il être jaloux ? La jalousie a deux définitions : ce peut être un sentiment d’envie immédiate, survenant en situation de compétition, ou bien encore un sentiment plus complexe, qui naît de la peur de perdre un être aimé ou un objet. Si le chien est parfaitement capable d’éprouver la jalousie telle que la présente la première définition, il est en revanche improbable qu’il puisse connaître le sentiment complexe décrit dans la deuxième. Cela nécessiterait qu’il réalise la prouesse intellectuelle d’attribuer des sentiments futurs à autrui et d’imaginer les conséquences qui pourraient en découler. Youpi ne peut se retrouver en concurrence directe avec le bébé à naître que s’il le reconnaît comme un compétiteur potentiel, ce qui ne surviendra qu’à la puberté de l’enfant. En revanche, il n’est pas capable de craindre un éventuel désam